ADRESSE XIII
Au peuple du Bénin
Aux démocrates de par le monde.
Appel à la solidarité et à l’humanisme en soutien aux travailleurs béninois en lutte.
Béninoises, Béninois
Mes chers concitoyens,
Démocrates de par le monde,
Depuis au moins deux mois accomplis, les travailleurs du Bénin mènent une lutte qui, bien que revêtant à maints endroits un caractère apparemment corporatiste, touche fondamentalement aux libertés fondamentales, au respect de la dignité de l’homme, à la sauvegarde du patrimoine national, au relèvement de la ruine de l’Ecole et du système de santé publique, au respect des lois que le peuple s’est librement données. C’est la lutte contre un système en œuvre, un système de dictature autocratique et ce, en plein 21ème siècle; un système où l’homme serait ravalé au rang de l’animal pour produire seulement de la richesse, non pour le pays, mais pour un homme et son clan ! Dût tout le peuple en périr ! C’est un combat pour la démocratie ; c’est un combat pour la renaissance de la patrie béninoise et donc africaine ; c’est un combat pour l’homme tout court sur notre planète- terre ; c’est un combat pour l’humanisme.
Depuis deux mois donc, le pouvoir de Patrice Talon dans sa double logique de constitution de son empire financier et d’instauration d’un régime fasciste pour le protéger, recourt seulement à la ruse, aux méthodes de tromperie, à la corruption massive et à la répression. Au lieu de privilégier le dialogue entre partenaires sociaux, de comprendre le bien fondé des revendications des travailleurs et d’agir en bon dirigeant, il recourt à la violence, aux menaces de toutes sortes ; même aux menaces contre la vie. Des travailleurs par milliers sont victimes multiples de cette situation. Le plus sérieux et le plus grave, parce que touchant au quotidien de la vie du travailleur, c’est la rétention des salaires et sa défalcation. Des travailleurs sont ainsi menacés dans leur vie et donc complétement fragilisés dans leur existence. Ils sont en butte à la faim ; en butte à la misère, aux maladies de toutes sortes ; ils sont menacés même dans leur logement. Et pourtant ils poursuivent le combat.
C’est le lieu ici de leur rendre solennellement hommage ! Car travailleurs, vous méritez de la patrie.
Peuple du Bénin !
Démocrates de par le monde !
Je sais par tous les échos qui me parviennent, que la lutte des travailleurs en lutte au Bénin a déjà reçu votre soutien total.
Car la cause qu’ils défendent est une cause commune à tout le peuple, commune à tous les démocrates de par le monde. La chicote qui frappe les travailleurs en ce moment, c’est cette même chicotte qui frappe le propriétaire de maison, l’artisan dépanneur de cycles, tous accablés d’impôts, qui frappe la vendeuse du riz, le petit cafetier, la petite coiffeuse, tous chassés des bords de voie sans solution de relogement ; c’est cette main qui frappe la vendeuse des marchés qui ne trouve plus à vendre ; c’est elle qui frappe le paysan dans les campagnes ; c’est cette main qui a frappé les travailleurs chassés des entreprises publiques privatisées pour remplir le portefeuille de Talon et Compagnie et qui aujourd’hui ne savent plus à quel saint se vouer.
C’est pourquoi, Béninoises et Béninois de l’intérieur et de la diaspora, mes chers compatriotes, Démocrates de par le monde,
Je sais que votre soutien va déjà, à maints égards, jusqu’à l’aide matérielle.
Par la présente, je vous appelle, je nous appelle à la solidarité consciente à l’endroit de nos travailleurs au front de défense de la sauvegarde de la patrie.
J’appelle, j’encourage, la vendeuse d’abobo (haricot), la vendeuse de riz, de maïs, de poisson, à accepter de donner ou de vendre à crédit au travailleur affamé ; le tontinier et même le banquier d’accepter le rééchelonnement des traites de prêts sans agios calculés ; le bailleur de maison, d’accepter le report de payement des loyers ; la coiffeuse, de tresser à crédit nos femmes combattantes ; l’infirmier (en grève) de soigner sans réserve le travailleur et sa famille et sans le sou, etc.
Venez en aide matérielle, financière, morale de toutes sortes aux travailleurs en lutte. Faites preuve d’humanisme comme le peuple sait toujours le faire.
Tel se sont comportés nos aînés tout au long de l’année 1989 pendant que les fonctionnaires traînaient des mois sans salaires ; tel se sont comportés nos aînés en soutenant les prisonniers, les clandestins et exilés politiques sous la dictature barbare de Mathieu Kérékou. Tel, avant cette période, se sont comportés nos aînés dans la longue grève africaine anti-coloniale des Cheminots de l’AOF de 1947, qui ont nourri pendant six mois les travailleurs africains, et qui a permis de l’emporter. Tel je vous demande de faire ! Pour mériter de nos aînés, pour mériter de la Patrie béninoise ; pour mériter d’être citoyen du monde.
Je vous remercie
Cotonou, le 23 Mars 2018
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