EDITORIAL
Que vive le Parti Communiste du Bénin !
Décembre 1977 Décembre 2020, cela fait 43 ans que naquit le Parti Communiste du Dahomey, aujourd’hui Parti Communiste du Bénin. Dans la mise en oeuvre de sa détermination à lutter pour la libération de notre pays du joug étranger pour construire un pays resplendissant, il est devenu naturellement la cible à abattre par les impérialistes et tous les agents de l’étranger à qui profite la situation actuelle. Mais le Parti Communiste, créé sur la base d’une théorie solide, une étude constante des réalités de notre pays qui lui permet une liaison avec les aspirations profondes du peuple, se révèle coriace, tenace et vivace. Il a pu vaincre la force brutale de la dictature autocratique de Mathieu Kérékou, rester ferme contre la force répressive, haineuse et corruptrice des pouvoirs du Renouveau Démocratique. Aujourd’hui, il fait face à une nouvelle autocratie, tyrannique, celle de Patrice Talon.
Les communistes peuvent être fiers du parcours accompli par leur Parti dans la confiance que la révolution triomphera pour que notre pays, le Bénin, rattrape tous les retards de son développement.
Il ne fait alors aucun doute que notre peuple, qui a réussi sous les conseils et la direction du PCB à renverser le pouvoir autocratique de Mathieu Kérékou, réussira aussi à renverser celui autocratique de Patrice Talon pour un gouvernement patriotique et de probité.
Vive le Parti Communiste du Bénin !
La Rédaction.
INTERVIEW DU PREMIER SECRETAIRE PAR "LA FLAMME"
A L’OCCASION DU 43EME ANNIVERSAIRE DU PCB SUR L’HISTOIRE DU PARTI.
INTRODUCTION : PRESENTATION ET MOTIVATION DE LA CREATION DU PCB.
ournaliste : Mr le Professeur et Premier Secrétaire du Parti communiste du Bénin, merci d’avoir accepté de nous accorder cette causerie interview. Nos motivations sont les suivantes : Votre Parti, le Parti Communiste du Bénin va avoir 43 ans le 31 décembre prochain. Ce Parti est connu comme une épine dorsale dans les luttes pour la démocratie dans notre pays. Mais, les jeunes notamment ne connaissent pas son histoire ou alors à travers ce que l’on en dit ; « le Parti des courageux, des généreux, des patriotes » ; mais aussi des choses pas très bonnes comme ceci : « c’est le Parti des malheureux, des gens qui ne veulent pas le pouvoir, des rêveurs… si on les suit on va mourir pauvres etc. » Bref l’on en dit des choses bonnes et aussi des choses pas très bonnes. Dites Professeur, vous qui êtes membre fondateur du Parti et témoin de toute cette épopée ou mythe de ce parti, dites-nous un peu ce qu’il en est.
Mais avant cela pouvez-vous vous présenter brièvement aux lecteurs ?
Premier Secrétaire du Parti.
Merci M. le Journaliste. Humm…la question est bien vaste. Appelez-moi plutôt Mr le Premier Secrétaire.
Je m’appelle Philippe Toyo NOUDJENOUME né en 1948 à Houèglé (Commune d’Athiémé). Etudes primaires dans le village voisin, Konouhoué, collège Père Aupiais de 1961 à 1968 (Bac Philo aujourd’hui
Série A), universités de Dakar (1969), de Brazzaville (de 1970 à 1972), maîtrise à Caen (France) puis DES (actuel Master II) à Paris I Panthéon-Sorbonne en 1974-75, en même temps qu’élève administrateur civil à l’IIAP-Paris promotion 1974-1976, doctorat en droit en 1996 à Panthéon-Sorbonne. Soulignons que dès la première année de mon inscription en droit à Brazzaville, j’avais pris une seconde inscription en histoire et réussissais les deux certificats simultanément l’un (le droit) en session de juin, l’autre (l’histoire) en session d’octobre. Si bien que j’obtenais ainsi ma licence (actuelle maîtrise) en histoire en 1974 à l’université Paris VIII-Vincennes. Revenu au pays en novembre 1978, je fus recruté comme professeur–assistant à l’Université Nationale du Bénin (actuelle Université d’Abomey-Calavi) en février 1979. J’ai enseigné pratiquement toutes les matières de droit public mais particulièrement le droit administratif et le droit constitutionnel. J’ai conçu et réalisé les cours de « Grands Systèmes de Droits Contemporains » et surtout la « Philosophie de droit et de l’Etat » pour les Universités béninoises. Je fus admis à faire valoir mes droits à la retraite en octobre 2009. Pour finir, remarquez qu’entre mon DES (Master II) (1974) et la thèse de doctorat (1996) il y a eu un écart dû simplement au fait que dès mon retour au pays et après quelques mois d’enseignement, je fus mis en prison par le pouvoir despotique de Mathieu Kérékou pour appartenance au Parti Communiste du Dahomey et ceci a duré dix ans.
Au plan politique, en un court résumé, disons que je suis membre fondateur du Parti Communiste du Dahomey (actuel PCB), membre de la Direction Centrale depuis sa création en 1977, Porte-Parole du Parti et Rédacteur en chef de son Organe Central « La Flamme » depuis 1987 jusqu’en 2010, élu Premier Secrétaire du Parti après la mort du fondateur historique Pascal FANTODJI, en 2010.
Journaliste : Maintenant, dites-nous vos sentiments et comment vous abordez le 43ème anniversaire du PCB ?
Premier Secrétaire : A la veille de la commémoration de ce 43ème anniversaire de la fondation du PCB, mes sentiments sont ceux de fierté, de la satisfaction (personnelle et collective) face au chemin parcouru par ce parti qui est actuellement l’un des rares Partis communistes à exister et animer légalement la vie politique dans un pays aujourd’hui au sud du Sahara. Quarante-trois ans, ce n’est pas rien dans la vie d’un Parti comme d’ailleurs dans la vie d’un homme. Ma satisfaction est grande de voir grandir et s’implanter l’oeuvre de rêve que jeunes alors
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nous avons eu. Elle est grande de voir toute l’oeuvre que ce Parti a réalisée dans notre pays. Enfin, bien que l’objectif fixé par ce Parti : « faire la révolution au Bénin » ne soit pas encore réalisé, l’on ne peut qu’être heureux de voir que, malgré les grands obstacles dressés sur son parcours, le Parti Communiste du Bénin est devenu je puis l’affirmer, un patrimoine national que le peuple béninois dans sa grande majorité aime et porte dans son coeur.
Journaliste : Monsieur le 1er Secrétaire, on va certainement revenir aux origines ; comment le PCB a-t-il vu le jour ? Cela fait maintenant 43 ans, donc plus d’une génération, vos militants et le grand public ont besoin de savoir ou que vous leur rafraichissez la mémoire.
Premier Secrétaire : Humm !! L’histoire du Parti Communiste du Dahomey devenu en 1992 (du fait de sa légalisation Parti Communiste du Bénin), peut commencer par « Il était une fois de jeunes (intellectuels pour la plupart) animés du grand et positif rêve « aider à l’émancipation de leur pays et pourquoi pas de l’Afrique... »
En fait pour traiter cette question il faut d’abord dire « Pourquoi le Parti Communiste du Bénin a-t-il été créé ?
Le Journaliste : Justement c’est ce que nous voulons savoir. Dites-nous quelles sont les motivations de la création de ce Parti ?
Premier Secrétaire : Les motivations de ces Jeunes que l’on pouvait compter sur le bout des deux mains et déjà engagés dans les organisations de masse d’alors, UGEED (Union Générale des Elèves et Etudiants du Dahomey), FACEEN (Front d’Action Commun des Elèves et Etudiants du Nord) JUD (Jeunesse Unie Anti-impérialiste du Dahomey), et diverses Organisations Régionales de Jeunes (ORJ) s’expriment à travers les questionnements sur l’orientation des luttes et notamment devant l’échec de ce mouvement face au pouvoir pseudo-révolutionnaire et autocratique de Mathieu Kérékou.
Toutes ces organisations combattaient tous les pouvoirs installés par l’impérialisme français depuis l’indépendance formelle de 1960 pour perpétuer sa domination à travers le pacte colonial qui se résume en les points fondamentaux suivants : le contrôle de notre économie à travers notamment la monnaie, le CFA (Franc des Colonies d’Afrique (CFA) masquée en Franc de la Communauté Financière), la langue française qui permet une domination culturelle et un formatage des instruits, la domination militaire, etc. Toutes ces organisations prônaient la Révolution Démocratique et Populaire. Le pouvoir putschiste et pseudo-révolutionnaire de Mathieu Kérékou installé en 1972 a dissout à partir de 1974 toutes ces organisations et réprimé dans le sang le soulèvement populaire contre lui en juin 1975. Les masses étaient désemparées et leur mouvement décapité. Comment aller de l’avant dans la poursuite et l’atteinte de l’objectif de la Révolution ? Voilà le problème qui se posait et la création du Parti a été la réponse perçue par ce groupe de jeunes qui se sont battus pour la mettre en oeuvre.
Le Journaliste : Mr le Premier Secrétaire, vous parlez jusque-là de « nous jeunes d’alors ». Qui sont ces jeunes, peut-on les connaître ?
Premier Secrétaire. A tout Seigneur tout honneur, le principal mérite de la création du PCB revient à Pascal Fantodji. Pascal Fantodji en biographie résumée, Né en 1943 à Djakotomè dans le département du Mono-Couffo. Marié et père de deux enfants. Docteur de troisième cycle en mathématiques spécialité : théorie des nombres (Paris XI ; 1968-1971 : chargé de cours de mathématiques à L’IESB devenu université du Dahomey ; 1972-1974 : chargé de mathématiques spéciales à l’Ecole sainte Geneviève de Versailles. ;1975-1976 : professeur vacataire de mathématiques à l’Ecole spéciale des travaux publics de Paris ; 1976-1988 : professeur de mathématiques à l’institut national supérieur de l’enseignement technique (INSET) en Côte d’Ivoire ; 1986-1988 : chef de département formation scientifique INSET (mathématiques, physiques fondamentales et informatique) à Yamoussoukro ; membre du conseil de gestion de plusieurs grandes Ecoles en Côte-d’Ivoire. Il avait 34 ans à la création du Parti. Puis il y a les autres : IDOSSOU TCHONA David, le plus vieux du groupe à l’époque avec à peine la quarantaine ; Fidèle QUENUM, Philippe NOUDJENOUME, Gilbert KOUESSI, FANTODJI Raymond, ALAHASSA Damien, HOUNKPONOU Cocou Théophile, MEHOU Jean, TOGBAN Cocouvi Claude, ODJO Jean, ZOUNON Kokou Jean… Moi j’avais à l’époque 29 ans.
Le Journaliste. Mr le Premier Secrétaire peut-on savoir comment le Parti a été créé ?
Premier Secrétaire. Mr le Journaliste, ce qu’il faut savoir, c’est qu’un Parti Communiste se crée d’abord idéologiquement et théoriquement avant de se créer organisationnellement.
Le Journaliste : Pouvez-vous mieux nous expliquer, puisqu’aujourd’hui au Bénin, on se lève, on rassemble des gens, on en récolte quinze par commune et puis voilà le parti est créé. Ce que vous dites là est différent.
Premier Secrétaire. Tout à fait, c’est différent. Ces gens qui agissent ainsi se situent simplement dans le système existant avec son idéologie et ses prémisses théoriques. C’est différent pour un véritable Parti Communiste qui veut se bâtir sur du roc pour renverser ce système et construire autre chose. Donc il a fallu jeter les bases théoriques et idéologiques du Parti à créer ; car comme dit Lénine « sans théorie révolutionnaire, pas de mouvement révolutionnaire ». Il a fallu trois ans pour définir les bases théoriques et idéologiques du Parti à créer. Ceci s’est fait de 1973 à 1976. Et le choix s’est porté sur la théorie du marxisme-léninisme.
Le Journaliste : Mais pourquoi avez- vous porté votre choix sur le marxisme-léninisme ?
Premier Secrétaire ; C’est simple. L’objectif, c’est la libération de notre pays du joug de la domination impérialiste, coloniale française en particulier. Or, il y a des peuples qui l’ont réalisée, comme le peuple chinois, et les peuples d’Indochine (Viêt-Nam, Laos, Cambodge) qui étaient des colonies françaises comme nous. L’arme qui leur a permis de lutter et de vaincre, de résister à toutes les pressions et menaces dans la construction de leur pays, c’est le Parti Communiste doté de l’idéologie du marxisme-léninisme.
Nous avons décidé de créer le Parti Communiste donc un Parti basé sur le marxisme-léninisme. Il a fallu lire et étudier les auteurs classiques de cette théorie en l’occurrence Marx, Engels, Lénine, Staline. Ensuite, définir la méthode de combat. Comme la révolution, ce n’est pas l’affaire d’un individu ou un groupe d’individus qui se lève et va la faire (dans ce cas on serait dans le schéma d’un putsch) et que c’est l’affaire du peuple et donc des masses de gens convaincus et déterminés, la méthode de combat consiste à amener cette masse de gens à se lever et à la réaliser en renversant l’ordre établi. La seule méthode qui corresponde et que nous appelons « tactique générale », c’est l’insurrection générale armée.
Le Journaliste. Mr le Premier Secrétaire, vous allez un peu fort en parlant de « Insurrection générale armée ». Pourquoi armée ? Ne voyez-vous pas que c’est pour cela que l’on parle de violence de votre part ?
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Premier Secrétaire : Mr le Journaliste, ce n’est qu’un mauvais procès que l’on fait. Tenez Mr le Journaliste. L’insurrection, le soulèvement populaire sont des méthodes de lutte populaire connus et pratiqués par notre peuple depuis longtemps. Je peux vous citer pour ne pas aller très loin ceux de Cotonou en 1957-68, de Cotonou-Porto-Novo en 1963 ayant entrainé la chute du pouvoir de Maga Hubert, celui de 1975 contre l’autocratie en oeuvre de Mathieu Kérékou. Mais Mathieu Kérékou avait écrasé ces insurrections (à Abomey et Cotonou) dans le sang.
Les pouvoirs que vous avez en face de vous et qui vous gouvernent, ils vous exploitent, vous pillent, vous réduisent à la faim, arrachent vos biens. Vous voulez réagir, ils déploient la force armée, la police et la justice et vous enlèvent toute possibilité de réaction ; vous mettent en prison ou vous contraignent à vous taire ou à vous exiler à l’extérieur ; en un mot, exercent une violence aveugle sur vous. Et ce n’est pas fini. Lorsque vous manifestez votre indignation pacifiquement comme ce fut le cas les 1er et 2 mai 2019, on tire sur vous et on tue. L’exemple de dame Amoussou est là. Autrement dit, ceux qui sont au pouvoir ont de gros intérêts à défendre et ils n’accepteront pas volontairement d’y renoncer. Il faut les y contraindre. La seule méthode pour le peuple qui se soulève pour les y contraindre, c’est de prendre des dispositions armées et ce en légitime défense pour éviter un massacre inutile en son sein. Quand on dit insurrection générale armée, ce n’est pas seulement que le peuple qui s’arme comme il peut pour se défendre ; c’est aussi et surtout qu’une partie de l’armée régulière passe au moment de l’insurrection aux côtés du peuple insurgé. Sans cela, aucune révolution n’est possible. On a vu un peu ce qui s’est passé en fin octobre 2014 au Burkina Faso, il a fallu qu’une partie de l’armée se démobilise ou soutienne le peuple pour qu’on ait obtenu ce qu’on a eu.
Le Journaliste : Après cela, dites-nous quelles sont les étapes de la création du Parti ?
Premier Secrétaire :. Mr le Journaliste, je serai un peu long. La période de lutte pour la création du Parti peut se subdiviser en les sous-étapes que sont : 1°- Préhistoire du Parti Communiste du Bénin : Période du populisme anté-marxiste (1956-1974), 2°- Période de luttes théoriques et idéologiques pour la création du Parti : 1973-75 3°-Les étapes de la création proprement dite du PCB (1976-1977)
I-- PREHISTOIRE DU PARTI COMMUNISTE DU BENIN : PERIODE DU POPULISME ANTE-MARXISTE (1956-1974.).
Le courant communiste a été créé au Bénin dans les années 1924 par les révolutionnaires. On peut citer certains grands lettrés qui ont pu aller en métropole (Tovalou Quenum par exemple) qui se sont initié au marxisme-léninisme dans des groupes d’immigrés venus des colonies. Ainsi, s’explique l’intérêt en 1928 de Hô Chi Minh pour le Dahomey où il a fait un bref séjour.
Mais le début de la naissance du courant marxiste-léniniste au Dahomey peut être situé dans les années 1950. L’année 1956 fut une année charnière pour le mouvement communiste international. C’est la mort de Staline et le 20ème Congrès du PCUS et la clique révisionniste de Khrouchtchev prit la direction du PCUS et amorça la révision de la ligne marxiste-léniniste du Parti avec le mot d’ordre de déstalinisation. Le mouvement communiste international se divisa en deux : d’un côté les partisans du révisionnisme ou khrouchtchéviens et de l’autre les opposants à ce révisionnisme. Le Parti Communiste Chinois et le Parti du Travail d’Albanie prirent la tête de ces derniers. Cette situation eut une profonde répercussion sur le mouvement communiste au Dahomey.
En 1957, fut créé le Parti Africain de l’Indépendance (PAI). A partir de 1957 (l’école était déjà passée du caractère de caste au caractère de classe dix ans auparavant), les premiers groupes marxistes ont commencé dans le pays une activité notable quoique clandestine.
Très tôt, ce parti s’est placé à la remorque des dirigeants de l’Union Soviétique (Khrouchtchev) et n’a en réalité pas fait souche au Dahomey contrairement à ce qu’il en a été au Sénégal, en Guinée Bissau, au Cap Vert, en Haute-Volta, au Soudan français (actuel Mali)- PAI-Sénégal, PAI-Haute-Volta ; PAI-GC-Guinée Bissau et Cap-Vert ; PAI-Mali. En 1960, les dirigeants du Parti communiste chinois annoncèrent leur scission d’avec les dirigeants du Parti Communiste de l’Union Soviétique (PCUS).
Le Mouvement des Etudiants du PAI (MEPAI) au sein duquel militaient les étudiants marxistes de tous les pays de l’ex AOF, parmi lesquels les étudiants dahoméens, fut secoué par cette scission et bien vite la tendance pro-chinoise l’emporta.
Au Dahomey, le groupe qui oeuvrait à une sorte d’unité au sein des groupes créés depuis 1957 dans le sillage du PAI était l’Organisation des Révolutionnaires du Dahomey (ORD). Bien vite avec l’alignement de l’ORD sur les positions révisionnistes de Moscou s’opéra une scission en son sein avec la naissance de l’Organisation des Marxistes-Léninistes du Dahomey (O.M.L.D).
L’ORD donnera plus tard la Ligue Nationale de la Jeunesse Patriotique (LNJP) à partir de 1968 et l’OMLD contrôlant beaucoup plus le mouvement étudiant et scolaire avec un effort de travail au sein de la paysannerie donnera les diverses organisations de jeunes et d’étudiants dont l’essentiel fut regroupé dans la JUD.
Comme on le voit l’ORD reflétait les vues de Moscou et l’OMLD, celles de Pékin.
Outre ces deux groupes principaux, il faut ensuite distinguer ceux qui, constitués en organisation révolutionnaire à Paris parmi les ingénieurs agronomes, les ingénieurs des travaux publics et les ingénieurs du génie rural ont commencé au milieu des années 60 à contrôler les organisations syndicales surtout celles où l’on retrouve des cadres de niveau intellectuel assez élevé. (Ils étaient pour la plupart concentrés à la résidence France d’Outre-mer – FOM). D’où leur appellation de Fomards. Leur ligne était un mélange éclectique de marxisme et de trotskisme.
Un quatrième groupe surtout basé au nord du pays était composé de petit-bourgeois éclectiques qui préconisaient une politique réformiste et prêchait dans les faits une division des nationalités plutôt qu’une politique réelle de libération et d’union des nationalités. Ce groupe était appelé par nous « Nordiens » ou groupe « Fitila » « La Lanterne ») du nom de l’organe d’information qui portait entre temps leurs vues et informations. Ce groupe oeuvrait dans les organisations de masse du Nord et se créa en 1967 son organisation d’élèves et d’étudiants du pays (FACEEN).
Le Journaliste : Premier Secrétaire, qui sont les principaux animateurs de ces différents groupes ?
Premier Secrétaire : Avec l’ORD, nous avons comme principaux animateurs notamment les Dègla Joseph, Ogouma Simon, Cakpo-Chichi T. Gratien, Azodogbèhou Codjo François. Pour l’OMLD, nous avons notamment Guy Hazoumè, Dossou Robert, Fakorédé Azaria, Adjo Boco Ignace, Dassoundo Gédéon, Akindès Adékpédjou Sylvain, Sarè Eustache. Pour les Fomards,
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ce sont notamment Amoussou Bruno, Mito-Baba Florentin, Ladikpo Rigobert. Pour le groupe dit « Fitila », les principaux animateurs sont Abdoulaye Issa, Boukary Guy Mory, Mama Adamou Ndiaye etc.
Le Journaliste : Vous avez parlé de la période de populisme. Quels sont les éléments expressifs du populisme et du spontanéisme ?
Premier Secrétaire : Le premier élément est que ceux qui se réclamaient du marxisme-léninisme cachaient cette théorie aux masses et se cachaient sous des organisations de masses. Le deuxième est la négation dans les faits du rôle et de la nécessité de la création du Parti de la classe ouvrière pour la conduite de la Révolution au Dahomey (actuel Bénin). C’est comme si on peut parvenir à la révolution et même à la « RNDP » qu’ils préconisaient, sans la direction du parti de la classe ouvrière. Seule l’ORD a maladroitement posé la nécessité de créer le parti en créant une Organisation de masse telle la LNJP. Cette sous-estimation du rôle du parti de la classe ouvrière constitue le défaut principal de tous ces groupes et leur opportunisme.
Le troisième élément est l’orientation du travail prioritaire au sein de la paysannerie avec un mot d’ordre comme « travail prioritaire à la campagne ». D’où la caractérisation de « populiste ». Le Parti Communiste du Bénin s’est constitué par scission d’avec l’OMLD et en combattant ces vues spontanéistes et populistes.
Confronté à la rigidité des responsables de l’OMLD dont Pascal FANTODJI n’était qu’un simple militant de base, il s’investit dans sa région natale et a créé le groupe marxiste-léniniste, La Cellule locale qui jouera un rôle important dans les luttes idéologiques et théoriques pour la création du Parti.
Le journaliste : Et quelles ont été les étapes de la création du Parti ?
Le Premier Secrétaire : La création du Parti Communiste du Dahomey s’effectua en deux manches : la première c’est la création de l’Union des Communistes du Dahomey (UCD) et la deuxième c’est la fondation proprement dite du Parti Communiste.
A- Création de l’UCD
Elle s’effectua aussi en deux manches.
Une Conférence politique eut lieu en juillet 1976 dans la banlieue parisienne, rassemblant un certain nombre de responsables de cercles qui prêtèrent serment de procéder à cette création et adoptèrent les textes fondamentaux dont un appel à « Rassembler les marxistes-léninistes du pays pour créer le Parti et unir le peuple ». Etaient présents à cette première Conférence Politique constitutive de l’UCD outre Pascal FANTODJI, QUENUM Fidèle, Philippe NOUDJENOUME, KOUESSI Gilbert, Raymond FANTODJI, David Tchona IDOSSOU, HOUNKPONOU Cocou Théophile, Damien ALAHASSA, MEHOU Jean, TOGBAN Cocouvi Claude et HOUNYO Mathias. Ainsi fut fondée l’Union des Communistes du Dahomey (UCD). On parle de première manche de la Conférence Politique Constitutive de l’UCD, car la deuxième qui devait réunir tous les autres cercles éparpillés sur le territoire national était prévue pour se tenir à l’intérieur du pays. Compte tenu des questions de sécurité, cette deuxième manche se tint au Togo en septembre 1976. C’est au retour de cette seconde manche qu’intervint à la frontière togolaise l’arrestation par les limiers de l’autocratie des camarades avec tous les documents constitutifs. Il fallait dès lors ne plus attendre pour la proclamation à la face du monde de l’existence de ce groupe préfiguration du Parti pour ne pas être présentés comme comploteurs par l’ennemi. D’où la proclamation du manifeste de l’UCD en septembre 1976.
B- Proclamation de la fondation du Parti Communiste du Dahomey.
Quatorze mois plus tard, le travail de rassemblement des communistes était assez avancé et le Parti Communiste du Dahomey a proclamé sa naissance le 31 décembre 1977.
Ce qui accéléra la victoire et la cristallisation du courant communiste contre le populisme, c’est à la fois des facteurs externes et internes au mouvement révolutionnaire lui-même. Des facteurs externes : c’est la dissolution de la JUD et de toutes les organisations démocratiques le 17 février 1974 par le pouvoir de Kérékou ; la répression contre les responsables syndicaux suite au mot d’ordre de grève générale « jusqu’à la chute de Kérékou », lancé par les Adanlin Timothée et Mito-Baba après l’assassinat d’Aïkpé en juin 1975. Facteurs internes : le mot d’ordre donné par les responsables du mouvement populiste en l’occurrence Fakorédé Azaria aux organisations dissoutes « de se considérer comme sans père ni mère ». Tout cela signe la faillite du populisme.
Le journaliste : Comment s’est édifié le Parti ?
Le Premier Secrétaire : Après la création, l’édification s’est déroulée de décembre 1977 à 1989 et se caractérise par deux éléments : élaboration de la théorie de la révolution ; et mise en oeuvre d’une tactique politique et organisationnelle d’union du peuple autour du Parti.
A- Elaboration de la théorie propre de la révolution au Dahomey
La création d’un Parti communiste n’est pas une fin en soi. Par création, il faut entendre la position ou l’adoption des bases théoriques et idéologiques du Parti. Ces bases théoriques et idéologiques s’entendent comme la théorie générale qui est le marxisme-léninisme. Mais cela ne suffit pas. Il faut élaborer la propre théorie de la révolution au Bénin. Cela doit consister en l’étude de la société béninoise à transformer.
Pascal écrit à cet effet « La création du parti de la classe ouvrière n’est pas une fin en soi. Le parti de la classe ouvrière, c’est le parti de la révolution. Mais on ne peut la faire sans en connaître les lois générales et les lois particulières dans un pays. Aussi devons-nous persévérer dans l’étude des sociétés que nous entendons transformer, procéder à une recherche approfondie sur la voie du développement dans laquelle elles se sont engagées ; analyser dans le détail les contradictions inhérentes à cette voie et celles produites par l’histoire séculaire de nos sociétés mêmes. Seule cette analyse permettra d’appréhender correctement l’issue inéluctable de la situation actuelle dans notre pays » (Rapport au deuxième plénum du CC issu du congrès constitutif). Les textes constitutifs de la théorie de la révolution au Bénin furent les ouvrages « Introduction aux réalités économiques et sociales du Dahomey (Editions NBE, 1979) ; Réalités économiques et sociales au Dahomey-Les sociétés précoloniales au Dahomey ( Editions Jeunesse du monde, 1980) ; Rapport au 2ème Plénum du CC issu du Congrès constitutif ( mars 1980) ou Volume 2 ; « Etude du mouvement réel de l’histoire », Rapport au 3ème plénum issu du Congrès constitutif.
B- Mise en oeuvre d’une tactique politique et organisationnelle adéquate.
Le défaut de liberté était le problème dominant de l’époque du pouvoir Kérékou-PRPB, le second problème des masses était la faim. Le Jeune Parti lança donc le mot d’ordre tactique de « Lutte pour le Pain et la Liberté » et s’est mis à la tâche d’organiser les masses en vue de sa prise en charge. Outre l’UJCB créée dès 1976, il y eut les Organisations telles que les groupes d’unité d’action à l’université (GUAU) et les comités d’unité d’action syndicale (CUAS) en milieu travailleur salarié.
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Le Bénin étant un pays multinational, les diverses nationalités qui peuplent le pays depuis l’agression coloniale de 1894, sont opprimées et mises sous le joug du colonialisme français. La question d’importance qui se pose alors aux nationalités est celle de leur libération et de leur union pour leur mancipation. Le Parti prit le mot d’ordre de « libérer et unir les nationalités ».
A la campagne les noyaux de communistes ont aidé les paysans à raffermir les syndicats paysans qui existaient et à en créer là où il n’y en avait pas. Les unions paysannes améliorent leurs méthodes de lutte et aboutissent plus tard à une fédération nationale, la FENUP. Toutes choses qui ont permis l’aiguisement des luttes contre la taxe civique, les taxes iniques et les vexations diverses à la campagne jusqu’à la suppression de la taxe civique en 1994.
Le couronnement organisationnel et politique de tout cela fut la fondation au 1er Congrès ordinaire du Parti tenu à Lagos (Nigeria en 1982) de la Confédération Syndicale des Travailleurs du Bénin (CSTB) et du Front Démocratique et Anti-Impérialiste du Bénin (FDAIB). Dès lors le Parti s’est déployé pour la conduite des combats des masses qui s’annonçaient. Ce qui intervint en mai 1985 avec les grandes luttes en milieu étudiant et scolaire.
Le journaliste : Que s’est-il passé ?
Le Premier Secrétaire : Le milieu étudiant avait déjà mené des grèves importantes (première grève après celle réprimée de 1975) qui ont ébranlé le pouvoir autocratique à laquelle il a répondu par des répressions massives. Mais cela n’a pas ébranlé le Parti qui a poursuivi son édification et son aide à l’organisation des travailleurs et du peuple comme dit plus haut. C’est ainsi que peu à peu s’est tissée l’union du peuple autour du Parti.
Le journaliste : Comment cette unité s’est-elle manifestée ?
Le Premier Secrétaire : La direction par le Parti du mouvement scolaire à caractère insurrectionnel du 6 Mai 1985 ne fait l’ombre d’aucune ambiguïté. Pour la première fois l’ennemi au pouvoir a reconnu l’empreinte du Parti qu’il a ciblé comme ennemi à abattre. Le pouvoir de Kérékou-PRPB enragé ordonna de tirer à vue sur tout regroupement scolaire de plus de 3 élèves. Le jeune élève ATCHAKA Parfait, manifestant pacifique, a été froidement abattu devant le CEG Gbégamey ce 6 mai 1985. Dans la même matinée, des étudiants pro- régimistes conduits par Sèhouéto Lazare, Houndété Eric, etc. furent reçus au Palais de la République pour clamer leur soutien au pouvoir fasciste de Kérékou et demander la répression ferme contre les révolutionnaires taxés « d’anarcho-gauchistes ». Le caractère de Parti de masse du Parti Communiste du Dahomey fut affirmé dès cet événement.
Avec l’aide d’un mouchard infiltré au sein du Parti, Bokononhoui Arcade, une chasse à l’homme a été lancée contre les communistes et les sympathisants en vue de liquider le Parti, à commencer par les responsables d’étudiants que furent Sindété Denis, Waounwa Thérèse, Agbètou Osséni, Issifou Alassane, Aboubakar Baparapé. Une vague d’arrestation s’abattit ainsi sur les membres du Parti dont un bon nombre furent conduits, torturés au camp de torture de Séro Kpéra de Parakou puis aux geôles de Ségbana. Certains responsables tels Zounon Kokou Jean, Noudjènoumè Philippe, Koudoukpo Paul prirent le maquis ainsi que des responsables étudiants communistes, tels Sindété Denis, Waounwa Thérèse, Agbètou Osséni, Issifou Alassane.
Pendant cette répression féroce, toujours confiant en l’avenir, le Parti publia sa fameuse « Adresse au peuple pour un Dahomey Resplendissant », écrite par le Premier Secrétaire historique Pascal Fantodji en 1986 indiquant qu’il était devenu indéracinable dans le pays.
Très vite, le mouvement reprit confiance. Les escarmouches et luttes reprirent donc de plus belle (1987). Les Comités d’actions ou CTG (Conseils de Travail et de Gestion) commencèrent à naître tant dans les campagnes contre les répressions de taxes civiques et dans les centres urbains. L’explosion approchait. Les matériaux s’amoncelaient à toute vitesse : l’affaire de déchets toxiques et nucléaires, de multiples tentatives de coups d’Etat manqués. Il fallait organiser pratiquement la conduite de l’insurrection murissante. Il fallait donner au mouvement un creuset d’union du peuple autour du Parti pour la Révolution.
La Convention du peuple fut à cet effet fondé en octobre 1988 et les mouvements insurrectionnels qui ont débuté le 15 décembre 1988, ont été conduits sous sa direction toute l’année 1989 pour atteindre son apogée le 11 décembre 1989 où l’autocratie a été renversée.
La tenue de la Conférence Nationale n’a été qu’un Complot monté de l’Elysée pour sauver le pouvoir de l’autocrate Mathieu Kérékou et sauver le système de domination impérialiste au Bénin.
Le journaliste : Comment se poursuit le combat pour la Révolution ?
Premier Secrétaire : L’objectif général demeure ; c’est faire la révolution au Bénin en mettant fin au Pacte colonial qui consiste en quoi : la fin du franc CFA, la fin de la langue française comme langue officielle (avec l’instruction de nos enfants en langues nationales, l’administration du pays et la justice en langues nationales et la souveraineté sur nos ressources du sol et du sous-sol). Avons-nous atteint cet objectif ? C’est non ou du moins pas encore.
Donc les succès remportés par le Parti ne sont que des succès partiels mais indicateurs des avancées vers la réalisation de la révolution patriotique au Bénin.
Parmi les succès remportés l’on peut noter ceux ayant trait au patriotisme. Autrement dit, nous avons fait avancer la cause du patriotisme. Nous citerons particulièrement le combat victorieux contre la recolonisation mise en oeuvre avec la candidature de Lionel Zinsou en 2015-2016.
Le Journaliste : Justement, vous parlez beaucoup de patriotisme. Alors, pouvez-vous expliquer les articulations de cet ordre patriotique et les modalités de son avènement ? On entend beaucoup de bruits sur la restauration de la démocratie et les élections inclusives. Mais, est-ce que cela suffit aujourd’hui, si l’on sait que malgré les élections inclusives sous le renouveau qui est lui-même une restauration de la démocratie, on se retrouve comme à la case départ, pour ne pas dire à nouveau devant une dictature autocratique ?
Premier Secrétaire : Avant d’aller dans les détails, il faut préciser quelques notions : la démocratie et le patriotisme. Le patriotisme c’est l’amour de la patrie, c’est la défense de l’ensemble des fils d’un même pays contre l’envahisseur étranger. La démocratie c’est l’ensemble des droits individuels et collectifs permettant la libre expression et la libre participation du citoyen aux affaires de l’Etat sans être inquiété et sans exclusion. Les deux notions sont fort différentes. En effet, on peut être patriote sans être démocrate. Et à cet effet, nos héros nationaux adorés pour leur patriotisme tels Béhanzin, Bio Guerra et Kaba sont loin d’être des démocrates. On peut se proclamer démocrate sans être patriote. Il ne faut pas mélanger les deux, car chaque élément requiert un traitement particulier. Par exemple la question de l’exclusion de la très large majorité du peuple des dernières élections
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législatives relève de la démocratie intérieure et ne nécessite pas d’intervention extérieure pour sa résolution. Il appartient au peuple béninois et au peuple seul à le résoudre. Voilà pourquoi nous avons toujours condamné toute intervention extérieure dans les questions démocratiques (comme électorales) au Bénin. Nous convenons que Patrice Talon n’est pas démocrate loin s’en faut. C’est un Autocrate, pire un tyran.
Journaliste : En quels termes se décline le patriotisme ?
Premier Secrétaire : Le patriotisme se décline en plusieurs volets :
1°- C’est d’abord la défense de l’intégrité du territoire, de la souveraineté du peuple contre une invasion, une agression étrangère.
2°- C’est surtout aujourd’hui, la lutte contre la domination étrangère pour le développement rapide de son pays du point de vue économique, car un pays arriéré ne saurait durablement être indépendant et souverain. C’est la lutte pour l’épanouissement de son peuple, de sa jeunesse, instruite et épanouie.
3°- C’est l’association de toutes les compétences, toutes les expertises, tous les hommes d’affaires du pays sans exclusive à l’oeuvre d’édification économique nationale.
Le patriotisme c’est l’édification d’une économie indépendante et prospère.
C’est ce que devraient faire tous les Gouvernements du Bénin. Le Bénin doit asseoir rapidement son patriotisme économique ; tel est le défi de l’heure.
L’adresse que j’ai faite le 12 septembre 2019 au peuple portant propositions pour une alternative patriotique est l’expression du patriotisme ardent.
Journaliste : Par rapport à la situation actuelle, comment apprécier le patriotisme face aux déclarations et pratiques des dirigeants actuels ?
Premier Secrétaire : Nous avons procédé à des clarifications terminologiques et politiques précises : le Bénin demeure un « enclos français » ; les paramètres qui déterminent ceci, sont le Franc CFA, notre monnaie demeurée depuis 1945 aux mains de la France, la langue française qui écrase toutes nos langues et cultures béninoises avec en particulier l’instruction en langue française, le mépris de nos institutions traditionnelles telles les royautés, les intellectuels traditionnels détenteurs de nos valeurs culturelles fondamentales etc. ; la démocratie dont nous jouissons aujourd’hui au Bénin (celle incarnée par la Constitution du 11 décembre 1990) ce n’est qu’une démocratie de prisonnier, celle compatible avec la sauvegarde des intérêts coloniaux français au Bénin. C’est dire que la première tâche qui incombe aujourd’hui au peuple béninois c’est de mettre fin à cette situation d’Enclos français en arrachant l’indépendance monétaire, l’insertion de nos dignitaires dans l’Organigramme politique judiciaire et administratif du Bénin, l’instauration de l’instruction dans les langues nationales, le déroulement de la justice dans les langues nationales, la souveraineté sur nos ressources nationales….Autrement dit, mettre fin au pacte colonial et réaliser la révolution patriotique. C’est par rapport à cela que l’on peut apprécier toutes les actions et prises de positions des différents groupes et hommes politiques au Bénin actuellement.
Il se fait que nous avons en face de nous deux camps tous deux pro-impérialistes ; l’un celui du pouvoir dit de la Rupture, et l’autre celui dit de l’Opposition.
Le premier pas à poser dans le sens de la libération du pays, c’est de renverser le pouvoir dit de la Rupture.
De ce point de vue, les Partis dits de l’Opposition qui s’illustrent dans les déclarations sur la « démocratie, l’Etat de droit, respect des droits humains » à l’exemple de celle du 27 Décembre 2020, se taisent curieusement sur le fait que l’un des premiers droits de l’individu, c’est d’être jugé au tribunal dans la langue qu’il comprend et que ce qui se fait aujourd’hui dans nos tribunaux est une négation fragrante des droits de l’homme ; ils se taisent éloquemment sur le fait que la démocratie béninoise n’est qu’une démocratie de « minorité », une démocratie pour à peine 25% de la population lettrée en langue française, etc. et ceci à l’exclusion des 75% de la population ; qu’elle n’est nullement démocratique. Ils ne disent rien sur la question importante de l’intégration de nos dignitaires dans l’organigramme politique et administratif béninois. Ces gens se taisent curieusement sur la question fondamentale du franc CFA. C’est dire que ces partis et mouvements de l’Opposition s’affichent ouvertement comme la coagulation de l’application du Pacte colonial et son renforcement au Bénin. En fait, ils sont pour le retour au passé après l’intermède du pouvoir despotique de Talon.
Le journaliste : Depuis quelque temps, le pouvoir de la rupture a posé certains actes consistant en la réclamation des biens culturels et dernièrement la promesse faite lors de sa tournée électorale de faire intégrer les dignitaires traditionnels dans l’appareil administratif du Bénin, sans omettre le débat initié par son Parlement de sang sur la question du Franc CFA ; autant d’actes que certains de ses partisans clament comme étant des actes « patriotiques ».
Le Premier Secrétaire : Je dis : La « réclamation de nos biens culturels volés par les colonisateurs » est une bonne chose et l’on ne peut que s’en féliciter. Quant à l’intention de vouloir faire intégrer nos dignitaires et intellectuels traditionnels dans l’appareil administratif béninois, je dis que d’ores et déjà le 30 Mai 2016 et confirmé à Nikki en 2017 les Rois, Reines, Chefs de Terre du Bénin notamment ont déposé au Gouvernement dans le cadre de la proposition des réformes politiques initiées par le pouvoir de Talon leurs propositions qui sont leurs exigences programmatiques et que l’on ne peut ignorer. Elles se formulent ainsi qu’il suit :
1°- La création au sein du Parlement de la Chambre des Nationalités composée de Représentants des Autorités traditionnelles et qui aura pour mission de contrôler la conformité des lois votées par les députés de l’Assemblée nationale avec les coutumes positives de notre pays ;
2°- La création d’une juridiction de droit traditionnel depuis le village jusqu’au sommet ;
3°- La reconnaissance par l’Etat des Rois, Chefs de terre, chefs de couvents, devins comme administrateurs et juges locaux et dûment rémunérés par les soins et fonds de l’Etat ;
4°- La reconnaissance par l’Etat des groupes de chasseurs de diverses contrées du pays ainsi que les brigades de jeunes (Donkpè dans certaines contrées) comme structures légales contribuant à la sécurité publique et leur rémunération subséquente ; dans le corps de la sécurité publique et de défense du territoire ;
5°- La reconnaissance par l’Etat des cabinets et cliniques des tradithérapeutes et guérisseurs comme établissements de soins de santé légaux et partie intégrante de la médecine officielle au Bénin ainsi que le paiement par l’Etat des activités de guérisons des guérisseurs traditionnels ; .
6°- La Reconnaissance de toutes les langues nationales comme langues officielles avec pour conséquences :
- Leur usage obligatoire à tous les niveaux de l’Administration de notre pays dans leurs terroirs respectifs ;
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- L’instruction des enfants dans leurs langues maternelles, l’alphabétisation des adultes sur leurs territoires respectifs ;
- Le déploiement immédiat de précepteurs pour alphabétiser les Rois, Reines, Dignitaires, Intellectuels traditionnels dans leurs langues maternelles sur leurs territoires respectifs ;
7°- La protection et la promotion du patrimoine national (économique, culturel, historique).
C’est dire que la promesse de faire intégrer nos dignitaires dans l’appareil administratif béninois est un pas positif mais largement insuffisant s’il n’intègre pas :
1°- La création au sein du Parlement de la Chambre des Nationalités composée de Représentants des Autorités traditionnelles et qui aura pour mission de contrôler la conformité des lois votées par les députés de l’Assemblée nationale avec les coutumes positives de notre pays ;
2°- La création d’une juridiction de droit traditionnel depuis le village jusqu’au sommet ;
3°- La reconnaissance par l’Etat des Rois, Chefs de terre, Chefs de couvents, Devins comme administrateurs et juges locaux et dûment rémunérés par les soins et fonds de l’Etat ;
4°- La Reconnaissance de toutes les langues nationales comme langues officielles avec pour conséquences : Leur usage obligatoire à tous les niveaux de l’Administration de notre pays dans leurs terroirs respectifs ; l’instruction des enfants dans leurs langues maternelles, l’alphabétisation des adultes sur leurs territoires respectifs ».
Le journaliste : Enfin, où en est le PCB par rapport à son récépissé ?
Le Premier Secrétaire : En fait, le Parti Communiste du Bénin a rempli toutes ses formalités. Il attend que le Président Talon cesse de séquestrer son récépissé pour le lui remettre.
Après la tenue du Congrès de conformité et le dépôt du dossier avant le 17 mars 2019, le Parti a satisfait ensuite à toutes les demandes de corrections des services du Ministère de l’Intérieur dont les dernières remontaient au 10 Mai 2019, en dépit de leur caractère abject et de chicanerie manifeste.
Lorsque le Président de la République a convoqué le 15 juillet 2019 les partis ayant déposé leurs dossiers au Ministère de l’Intérieur pour : « « échange sur les voies et moyens de conférer à chaque parti le statut juridique lui permettant de participer au débat politique », nous pensions que la situation allait se débloquer et que notre récépissé allait nous être délivré. Nous étions d’autant plus convaincus qu’après la rencontre, le Président de la République nous a demandé d’aller voir le Ministre de l’Intérieur pour régler les derniers détails.
Notre Parti s’est donc présenté au Ministère de l’Intérieur le 19 juillet 2019 pour simplement se voir délivrer le récépissé de mise en conformité de notre Parti. Mais quelle ne fut pas notre surprise lorsqu’arrivés au Ministère, on nous a demandé de refaire un congrès de fondation du Parti comme si nous venions de naitre. Ce qui est inadmissible ! Une telle démarche avait été évoquée par le Chef de l’Etat lui-même au cours de la rencontre du lundi 15 Juillet 2019, ce à quoi notre Délégation a rétorqué immédiatement en ces termes : « Monsieur le Président de la République, notre Parti le PCB, vieux de quarante-deux ans bientôt ne se plierait jamais à de telles incongruités qui manifestement signifient un déni de droit, un refus de reconnaissance légale de notre Parti ».
En demandant aux Partis existant avant les élections du 28 avril 2019 de dire qu’ils ont été créés après, le pouvoir veut leur faire avaliser non seulement les élections exclusives qui ont produit le Parlement monocolore actuel mais surtout nier et rejeter les sacrifices des masses qui, sur toute l’étendue du territoire, ont résisté aux pressions de toutes sortes pour boycotter des élections législatives où le pouvoir a été obligé de déclarer 27% de participation. Du jamais vu dans notre pays sous le Renouveau Démocratique !
Exiger particulièrement du PCB, qui a plus de 42 ans d’existence, de déclarer qu’il a été créé après le 28 avril 2019, c’est lui demander de cracher sur les sacrifices des masses les 27 et 28 avril 2019. C’est tirer un trait sur les sacrifices consentis par le peuple et les militants du Parti qui ont donné leur vie contre l’autocratie de 1975 à 1989, ceux-là dont les sacrifices ont permis la tenue de la Conférence Nationale qui nous a permis de jouir de quelques semi-libertés que le pouvoir vient de détruire avec la mise en place de son arsenal juridique. Le Parti Communiste du Bénin a rempli toutes ses formalités. Il attend que le Président Talon cesse de séquestrer son récépissé pour le lui remettre.
Voilà comment se pose le problème du récépissé du PCB. Voilà pourquoi de partout, le peuple doit exiger que le Président Talon consente enfin à remettre au PCB, ce qui lui est dû, à savoir son récépissé.
Journaliste : Votre mot de fin ou votre appel pour comment sortir de la quadrature du cercle ?
Premier Secrétaire : Je redis ma fierté face au chemin parcouru par le Parti Communiste du Bénin depuis quarante-trois ans. Je félicité tous les camarades, compagnons de lutte qui ont contribué à cette noble et digne tâche. C’est le lieu ici de rendre hommage à tous ceux qui ont contribué d’une manière ou d’une autre à cette épopée moderne et qui ne sont plus parmi nous. Je veux citer en tout premier lieu mon Chef, Camarade et Educateur, Pascal Fantodji qui (depuis avril 2010) n’est plus (en ce moment avec nous) ici-bas pour cet anniversaire ! Je rends hommage à Togbé Eké Michel, Mama Yari Moussa, Yènou Jean, Togban Cocouvi Claude, Kpomassi Sègla, Sossoukpè Cocouvi Paul, Akpokpo-Glèlè Rémy, Luc Togbadja, Yacoubou Jean Marie, Dossa Michel, Mèto Codjo, Mahinou Félix, Odjo Jean, Adjakpa Léon, Amoussou Marc, Amoussou Georges, etc. Je ne puis oublier ici les colonels Alladayè Michel, Atchadé André, et Damien Zinsou Alahassa.
Tous ont contribué d’une manière ou d’une autre à ce que le Parti est et demeuré aujourd’hui : un Parti de Gens généreux, probes, courageux, patriotes et prêts à sacrifier, s’il le faut leur vie, pour la Patrie. J’appelle tout le Peuple avec le PCB à une Union sacrée pour la Patrie !
J’appelle à une adhésion massive au Parti. Je m’adresse notamment aux Jeunes. « Venez dans mon Parti ! Le Parti Communiste est une grande Ecole où l’on apprend à vivre et à lutter pour la vie, pour la patrie. Le PCB n’est pas une secte. Il regroupe des femmes et hommes de chair et d’os déterminés à libérer cette patrie pour le bien-être de tous.
Enfin, à la veille de la nouvelle année qui débute dans quelques heures, j’adresse aux membres du Parti, à tout le peuple, mes voeux les meilleurs d’une heureuse Année 2021.
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A PROPOS DU MESSAGE DU CHEF DE L’ETAT A LA
NATION
e 29 décembre, comme annoncé afin de satisfaire à une
obligation constitutionnelle, le Chef de l’Etat, Patrice
Talon a délivré, en son Parlement de sang, un discours
destiné à la Nation. Pour tous ceux qui ont pu suivre ou lire ce
discours, il ressort que comme pendant la tournée dans le pays,
tournée à laquelle il fait d’ailleurs référence en introduction à
son allocution, Talon est allé encore parler à ses grands
électeurs à travers ses députés nommés.
Pour Talon, « Le Bénin va plutôt bien » Et il cite : « L’unité
nationale demeure un acquis intangible,…nos libertés
fondamentales elles aussi intangibles,…. Notre démocratie nous
permet de ne plus laisser une minorité initiée et privilégiée
prendre en otage tout le peuple innocent et mal informé …, Le
bien public est davantage respecté,… nous avons globalement
réussi les changements d’habitude les plus inespérés. ». Bref, le
pouvoir autocratique est un bonheur !
Mais le bonheur pour qui au Bénin ? Pour qui au Bénin, les
libertés fondamentales demeurent intangibles ? En tout cas,
pas pour l’immense majorité du peuple que la faim tiraille. Pas
pour l’immense majorité des jeunes qui vivent dans la galère
quotidienne, le chômage et sans perspective. Pas pour ces
jeunes que la police politique peut kidnapper et emprisonner
pour avoir parlé ou publié un message sur les réseaux sociaux.
Pas pour le peuple accablé de taxes et d’impôts, pas pour les
opérateurs économiques non soumis que l’on pourchasse à
coup de redressements fiscaux, sans parler des petits
producteurs dont les ateliers ont été détruits ; pas pour les
salariés et aspirants-enseignants que l’on soumet à des
pratiques esclavagistes. Bref, pas au peuple dépouillé de tous
ses droits, jusqu’à celui de désigner ses représentants. Pour
tout le peuple, le pouvoir autocratique de Talon est un enfer.
Son discours ne s’adresse alors qu’à ceux-là qui sont assis
autour de lui dans son paradis. Ceux qui n’ont pas faim et qui
n’ont pas soif de liberté. Ceux-là qui jouissent paisiblement,
dans l’impunité, du pillage du bien public. L’homme d’affaires
devenu Président de la République a légalisé par des lois et
textes le pillage des ressources publiques et la minorité initiée
et privilégiée autour de lui a pris en otage tout le peuple et ses
ressources que l’on gère et distribue dans l’opacité.
Le Bénin va bien pour le petit clan de gens autour du prince,
qui vit du pillage et de l’extorsion des produits du travail des
citoyens par le biais des impôts et taxes alourdis. Pour les
affamés, les éclopés, les dyalisés condamnés à mort par
l’abandon du pouvoir, la beauté des rues asphaltées n’auront
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