QUELQUES RECITS DE CRIMES FRANÇAIS AU DAHOMEY-BENIN
1°- Contre les peuples de l’Atakora
Il y a en effet cent ans, le 07 avril 1917, s’achevait l’insurrection du peuple natimba sous la conduite de KABA.
« Il est près de 18 heures (ce 7 avril) quand tout se termine. Le vacarme des armes cesse soudain ! Et soudain Woory tombe. Dans le ravin, c’est un véritable amoncellement de cadavres et de corps déchiquetés. Les boucliers déchirés, les anneaux de tirs, les carquois vides et les flèches brisées gisent pêle-mêle au milieu des chéchias et des étuis. Des crânes vides de leur substance nagent dans un mélange horrible de cervelle et de boue. L’odeur fade du sang fume sur le sol macabrement farci d’anonymes débris humains. La position est enlevée après un combat acharné de 4 heures et une lutte à la grenade. Bilan : Côté français : 4 tirailleurs sont tués et 26 autres blessés. Côté insurgés : plus de 400 tués sur le coup ; des milliers de blessés purent être dénombrés ; 320 prisonniers, en majorité des femmes et enfants…Plus de 19 Obus tirés, 39 grenades et 16000 cartouches » (p. 91, in Cl Iropa Maurice Kouandété ‘’ Kaba un aspect de l’insurrection nationaliste au Dahomey, 7 avril 1971’’ Editions Silva, Cotonou).
Il y a cent ans ! Un tel crime a été commis contre notre pays. Une telle humiliation a été infligée aux peuples de l’Atakora et du Bénin en général. Il y a cent ans : les restes de nos héros dorment encore dans les grottes ! Une véritable insulte à l’histoire, à la mémoire de tout Béninois.
Aucun Béninois digne de ce nom ne peut oublier.
Voilà des faits d’histoire qui expriment la barbarie du système colonial dont la logique instituée il y a cent ans se perpétue de nos jours sous de multiples formes. La langue, la monnaie, l’administration, les cultes et nos us et coutumes tout cela est désormais étranger ; tout cela exclut les peuples de l’actuel Bénin, vaincus il y a cent ans. Oui la colonisation continue et nous devons en prendre conscience, l’enseigner aux générations présentes et futures.
2°-
Contre le peuple Boo-Wassangari
Dans son livre, « Structures de Type féodal en Afrique », édité en 1965, Jacques LOMBARD nous fait toucher du doigt les abus de la colonisation dès ses débuts : des recrutements abusifs de 1911 à 1912, la destitution de deux chefs de Kandi qui s’opposaient au recrutement en 1914. En 1915 le cercle de Parakou a fourni environ 1200 jeunes gens. En plus des incorporations et des réquisitions, les colons blancs se faisaient transporter par les habitants dans leurs déplacements d’un coin à un autre. Ceci provoquait le départ massif des jeunes vers les autres horizons, laissant les villages aux vieux épargnés de ces corvées.
Les principales étapes de la bataille
A propos de l’insurrection wassangari sous la conduite de Bio Guèrra, le livre lumineux du professeur Djibril MAMA DEBOUROU a exposé des détails de cette lutte historique. Il expose les causes de la guerre de la manière suivante : « Les Batombou ne voulaient plus fournir des porteurs ; ils étaient fermement décidés à le faire savoir. Excédés par les levées d’impôts fantaisistes et arbitraires, ils manifestèrent de la mauvaise volonté à s’acquitter d’un tribut contestable dont l’utilité demeurait confuse dans leur esprit. Le tribut de sang, la conscription apparut comme un rapt intolérable qui tenait du génocide. Les tâches impopulaires imposées aux chefs traditionnels ruinaient entièrement leur prestige et leur attiraient la hargne de leurs sujets qui les érigeaient ipso facto en complices de l’oppression » (p.55). Les hostilités durent plus d’un an ; de septembre 1915 à septembre 1916.
Le dimanche 17 septembre 1916, les affrontements éclatèrent à nouveau. Le carnage de ce jour dépassait l’entendement, le premier tué était l’ami intime de BIO GUERRA, le nommé Sanni GUISO. Devant l’inégalité des armes, les hommes de BIO GUERRA n’avançaient plus...
« Tout le monde s’accorde à dire que Bio Guerra était en pleine action, planqué derrière un baobab encore visible sur le champ de bataille. De cette cachette, il décochait des flèches empoisonnées sur l’ennemi. Il fut tué en traitre dans le dos. Pour s’assurer que l’homme qui baignait dans son sang était bien Bio Guerra, on trancha sa tête afin de recueillir des témoignages volontaires ou forcés ». C’était le 17 décembre 1916, dans le village Baoura de la commune actuelle de Bembéréké ». Jusqu’aujourd’hui, la tête de Bio Guerra emportée par les colons français n’a pas été restituée pour des cérémonies dignes du Dignitaire Wassangari.
3°-
Crimes français contre le peuple holli
Mais en 1915, l’insurrection reprit de plus bel. Et le 22 Août lors d’une arrestation effectuée un jour de marché, les forces de police françaises furent attaquées et on dénombra deux morts et dix blessés parmi elles. Les forces d’occupation française effectuèrent des opérations contre la population à Itchako (17-18 septembre 1915 et Ichidé ’13 novembre 1915). Ce qui aboutit à une nouvelle paix provisoire le 10 février 1916. Mais le mouvement continua jusqu’à l’arrestation et la déportation du Roi Holli Otoutou Bi ODJO en novembre 1916 et sa déportation en Mauritanie. » (R. Cornevin, pp.418, 419).
Les Holli continuèrent la lutte sous la direction des chefs de de guerre ou Balogouns Okolo, Douro-Simi, Mohilo, Ikanlou. La révolte se termina en février 1916 par la reddition des chefs condamnés, eux aussi, à la déportation. Le roi OTOUTOU-BI-ODJO mourut en exil en Mauritanie ».
Depuis 2021, des Représentants du peuple holli se sont organisés en Association pour réclamer le retour des restes du Dignitaire Otoutou Bi Odjo pour des cérémonies dignes de son rang.
Nous traiterons des autres crimes du colonialisme français dans notre Prochain numéro. A suivre donc !
La Rédaction