POINT DE PRESSE
Cotonou, Bourse du Travail, le 23 février 2018
A propos de l’évolution de la situation socio-économique

Mesdames et Messieurs les journalistes,
Camarades et chers amis,

Dans toute période de crise, les événements sociaux et politiques interviennent à une fréquence plus accélérée. Ainsi depuis notre dernier point de presse le 28 février 2018 et la mémorable première journée nationale d’actions contre la gouvernance du Président Patrice Talon le 09 mars 2018, l’actualité abonde en événements instructifs de la marche inexorable de notre peuple pour une gouvernance patriotique et de probité et donc contre la dictature autocratique en œuvre au Bénin.
1- La crise économique et sociale apparaît plus grave. Le 11 novembre 2016, le Chef de l’Etat, en visite à Parakou demandait au peuple affamé la patience et promettait la fin des difficultés pour bientôt, dans un an. Plus de 16 mois sont passés depuis cette déclaration du Chef de l’Etat et deux ans après son arrivée au pouvoir. La faim s’est aggravée et étendue pour le peuple, et ce, à cause justement de la politique destructrice et prédatrice du Chef de l’Etat. Les déguerpissements et destructions des entreprises et initiatives de survie des milliers de petites gens, les liquidations des entreprises publiques, les assauts acharnés contre les entrepreneurs privés en dehors de ceux du cercle des hommes de la Rupture ont conduit aux licenciements et au chômage des milliers d’hommes et de femmes, à la mévente dans les marchés et à la rareté des commandes chez les petits artisans. D’où l’amplification de la faim, de la misère et de la déchéance physique et morale dans les ménages. Le gouvernement en a rajouté avec la répression des grévistes et des mesures criminelles visant à les affamer avec la défalcation sur les salaires et pire, leur confiscation, précipitant ainsi, sans égard à la vie de la personne humaine, des centaines de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants dans la détresse, en pâture à tous les dangers.

2- L’économie du pays tourne au ralenti. L’accaparement des secteurs vitaux et rentables de l’économie après la destruction, soit du monopole d’Etat, soit à la suite de l’acharnement contre les opérateurs privés concurrents, a pollué le climat des affaires et détruit la confiance de nombre d’opérateurs économiques. Les craintes et angoisses montent en ce qui concerne même la crédibilité de l’Etat, avec d’une part le non-paiement des créances et dettes intérieures, et d’autre part face à la multiplication des appels du Trésor béninois à des financements sur le marché régional des capitaux et surtout face aux insuccès répétés de ces appels. De décembre 2017 à ce jour par exemple, près de huit appels sur le marché régional ont été lancés et la plupart se sont soldés par des résultats médiocres : appel de 35 milliards le 20 décembre 2017, taux de couverture : 12,46 % ; appel du 01 février 2018 de 15 milliards, taux de couverture : 42,81% ; appel de 35 milliards le 15 mars 2018, taux de couverture 52,39%. Et aussitôt après cet échec, le 19 mars 2018, un nouvel appel de financement de 20 milliards, non plus à moyen terme, mais à très court terme, remboursable en 91 jours est lancé. Il apparaît des signes de la détérioration des finances publiques et de la trésorerie du pays ainsi que de la défiance vis-à-vis de la signature du Bénin.
Le PAG, devenu un slogan vide, est toujours en panne. En dehors des projets déjà bouclés avant 2016, tout le tapage tourne, surtout ces dernières semaines, autour des études à réaliser et qu’on attribue à des cabinets dans l’opacité totale devenue règle de gestion. On est toujours au niveau des effets d’annonce, espérant que cela atténuerait le bilan d’échec patent. Tout le monde sait qu’infrastructure ne signifie pas développement et attend des entreprises industrielles créatrices d’emplois. Talon et son gouvernement en ont promis 500.000 d’ici à 2021, soit 100.000 en moyenne par an. Le nombre le plus optimiste que le Ministre d’Etat, Bio Tchané, président du Comité de suivi du Pag a pu avancer, et sans en produire les sources est de 60.000 depuis l’arrivée au pouvoir de Talon. A comparer avec le nombre d’emplois détruits en 18 mois, on doit convenir là encore à un échec et que le pouvoir actuel conduit le pays à la catastrophe.
3- C’est au nom de l’assainissement et de la relance de l’économie que le clan au pouvoir accapare les secteurs vitaux et surtout se livre à la répression contre les opposants politiques et les concurrents économiques à sa politique. Talon et ses partisans parlent abondamment de lutte contre la corruption, embastille par pelletées des citoyens après des procès hâtifs et pour le moins juridiquement contestables. Mais pendant ce temps, la camarilla autour de l’autocrate peut s’en donner à cœur joie, et piller impunément. Dans un point de presse le 14 mars dernier, dans un effort pour se dédouaner de son silence sur les nombreux scandales en cours sous le pouvoir de la Rupture (salaires des ministres, marchés de gré à gré, Ravip, etc.), le président de l’Autorité nationale de lutte contre la corruption, a pu montrer et illustrer l’énormité des surfacturations dans la réalisation des projets sous le pouvoir de Talon. Oui, une moto coûtant 1,2 millions de francs en moyenne est facturée et achetée à plus de 5 millions de francs, soit quatre fois son prix réel ; voilà l’exemple et l’illustration de ce que couvre l’opacité de la gestion sous la Rupture. Si on achète une moto à quatre fois son prix réel, à combien reviennent réellement les infrastructures que l’on nous promet, adjugées de gré à gré ? L’impunité de cette association de malfaiteurs (l’Anlc a prouvé qu’il y a eu collusion entre trois des soumissionnaires à l’appel d’offres des motos que le ministre de l’environnement a fait exécuter malgré les rappels de l’Anlc), indique et illustre tout le caractère mensonger de la lutte contre la corruption ainsi que tout le cynisme de l’appel au sacrifice pour le peuple. Il est pour le moins indécent, pendant que l’on pille ainsi impunément le pays, de demander par exemple au propriétaire terrien de Glo djigbé de se laisser déposséder de sa parcelle pour 75 frs le m2.
4- Ce qui aura été donné au peuple de se voir confirmer ces deux dernières semaines, c’est la violation répétée et délibérée des lois de la République et de la Constitution par le pouvoir en place. Par décision DCC 18-045 du 20 février 2018, la Cour Constitutionnelle dénonce à la face du monde entier « le silence du Président de la République et du ministre de l’Economie et des Finances (qui) n’ont pas cru devoir répondre aux correspondances de la Cour leur demandant de faire tenir à la haute Juridiction leurs observations, de mettre à sa disposition les fiches de paie des ministres et le décret actuel portant détermination du traitement, des avantages et des indemnités des membres du Gouvernement. » La Cour constitutionnelle est méprisée et piétinée par Talon et son gouvernement. En condamnant le refus du Président Talon et de son gouvernement de répondre à l’exigence élémentaire de transparence dans la gestion du bien public et des sacrifices du contribuable béninois, la décision DCC 18-045 du 20 février confirme à la face du monde, que l’équipe à la tête du Bénin est une équipe de pilleurs et de hors-la- loi.
Ensuite, la décision DCC 18-075 du 15 mars 2018 condamne le Président de l’Assemblée nationale, le complice de Talon dans la légalisation de la dictature autocratique pour violation de la Constitution pour avoir « délibérément décidé de ne pas se conformer à la décision DCC 17-262 du 12 décembre 2017 » demandant d’une part la désignation des membres du Cos-Lépi le 21 décembre au plus tard et l’installation du Cos-Lépi le 29 décembre 2017 au plus tard, et d’autre part précisant que la Lépi demeurait la seule liste électorale valable jusqu’en 2021.
Un Président de la République qui viole constamment la Constitution, un Président de la République, ses ministres ainsi que le Président de l’Assemblée nationale qui jettent à la poubelle les décisions de la Cour Constitutionnelle et qui sont condamnés de violation de la Constitution, brisent l’édifice institutionnel au Bénin. Le constat est clair, l’édifice institutionnel est à terre. Il appartient au peuple, le souverain reconnu par la Constitution, d’exécuter le verdict prononcé par la Cour Constitutionnelle contre le Président de la République et son gouvernement ainsi que contre le Président du Parlement.
5- Déjà acculé par les luttes populaires qui l’ont mis aux abois et dans le désarroi, le pouvoir dictatorial multiplie les actes de provocations contre le peuple. Le préfet Toboula se singularise dans ce rôle de cerbère. Il a multiplié depuis le 09 mars 2018 des arrêtés liberticides contre le droit constitutionnel de manifestation. Le contenu de ces arrêtés qui ne visent que les manifestations à caractère revendicatif ainsi que le déguerpissement des pneus usagés le long des voies, indique la panique qui s’est emparée du pouvoir de Talon. Mais toutes les lignes rouges seront franchies, toutes les barrières seront renversées par le peuple pour arrêter la dictature en place. Le peuple béninois ne manquera pas d’accomplir cette tâche de salubrité nationale. La dictature autocratique, de pillage, et d’affameuse du peuple ne passera pas.
On en a pour preuve les échecs successifs infligés par les travailleurs et les étudiants en grève depuis près de trois mois. Les grévistes ont renversé les barrières des intimidations, des limogeages de directeurs, des arrestations d’étudiants et d’enseignants grévistes ; ils ont résisté et battu les aboiements du Conseil des ministres transformé en tribunal pour condamner leurs grèves d’illégales ; ils ont abattu et franchi les menaces de radiation ; ils résistent contre les b arrières des responsables corrompus et traîtres dressées par le pouvoir ; et surtout ils résistent courageusement au chantage anti-humain, terroriste, de la faim à eux imposé par le pouvoir de Talon depuis deux mois par les défalcations et la rétention de leurs salaires. Au-delà des grévistes, le peuple tout entier (et les rencontres avec les confessions religieuses le montrent bien) soutient le mouvement gréviste et condamne le crime de l’année blanche que le pouvoir de Talon s’apprête à commettre contre le pays et l’avenir de la jeunesse.
A ce propos, le FSP réaffirme ouvertement que les grèves en cours sont légitimes et légales. Il exige du Président Talon la rétrocession des salaires défalqués et la satisfaction des exigences de liberté, d’amélioration du pouvoir d’achat, d’arrêt des privatisations, de la ruine de l’Ecole et du système de santé publique. Le FSP appelle le peuple à soutenir les grévistes qui sont aujourd’hui au front du combat, aux prises avec une dictature terroriste qui n’hésite pas à confisquer les salaires pour les réduire par la faim. Le FSP appelle toutes les couches de la population à aider et assister les grévistes sur tous les plans, dans un humanisme de bon aloi comme le peuple a toujours su le faire tout au long de son histoire, pendant ses moments difficiles.
6- La déchéance physique et morale dans laquelle le pouvoir de Talon a précipité le peuple se manifeste également par un autre phénomène qui sème la hantise et l’angoisse dans les foyers et au sein de la population. Les informations relatives au phénomène d’enlèvement et de crimes rituels contre des Béninois en cours dans notre pays deviennent très inquiétantes. Depuis quelques jours, en effet, des compatriotes ont été arrachés à l’affection de leurs parents par des criminels sans cœur. Certains ont été retrouvés morts avec des organes sectionnés, égorgés ou vidés de leur sang. Le corps d’une dame a été retrouvé dans les mêmes conditions dans le Zou, assassiné par son propre mari. Le samedi 17 mars dernier, dans la ville de Bohicon, un enfant âgé de deux ans environ a échappé de justesse à un enlèvement. Il s’agit de phénomènes très graves, significatifs de la déchéance non seulement physique, mais surtout morale d’accaparement entretenue et diffusée par la politique et la pratique de pillage et de terreur impunie du pouvoir en place. La sortie du Parquet de Cotonou le 21 mars 2018 ne suffit pas pour apaiser les populations et les rassurer. L’arrestation de jeunes gens "gayman" non plus.
Le FSP condamne avec la plus grande fermeté ces crimes ignobles perpétrés sur des enfants sans défense et sur des femmes. Le FSP exprime sa compassion et sa solidarité à toutes les familles éplorées.
Le FSP déplore le silence du Gouvernement face à ces enlèvements et tueries et l’inaction de la République à rassurer les populations.
Le FSP invite le Gouvernement à prendre les mesures requises pour retrouver les coupables de ces pratiques inacceptables.
7- Au total, après deux ans, le pouvoir de Talon a échoué à redonner espoir et enthousiasme au peuple. Le bilan du côté du peuple, c’est la faim et la misère généralisée, c’est le chômage accru pour la jeunesse, c’est l’effondrement du climat de confiance et des affaires chez les opérateurs économiques en dehors du cercle autour du Chef de l’Etat ; le bilan, c’est l’opacité dans la gestion. Le bilan du côté du peuple, c’est les tentatives de confiscations des libertés, le retour des poursuites et détentions arbitraires contre les opposants politiques (comme celui de Laurent METONGNON) et les concurrents potentiels économiques à travers des procès truqués. Le bilan du côté des hommes au pouvoir, c’est le pillage des ressources publiques, la restauration et le renforcement de l’empire économique et financier du Chef de l’Etat et du clan autour de lui.
Le bilan, c’est la destruction de l’édifice institutionnel du pays par le parjure du Chef de l’Etat qui s’est mis hors les lois de la République et de la Constitution. Le bilan, c’est le chaos dans lequel Talon conduit
Le peuple sait qu’il a le droit de désobéissance civile comme le lui reconnaît la Constitution dans son article 19, alinéa 2. C’est pourquoi, le FSP soutient le peuple dans son combat pour arrêter la gouvernance autocratique, de famine, de pillage du Talon.
Merci.
Pour le Comité de Suivi
Le Porte-parole
Jean Kokou ZOUNON

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