Réforme de la gestion foncière au Bénin
Bureaucratie et taxes prohibitives pour écraser le paysan propriétaire

Depuis quelque temps, l’inquiétude court dans l'opinion nationale en ville et surtout à la campagne qu'à partir du 14 août 2023, l'Etat arrachera les terres aux propriétaires terriens qui ne possèdent pas de titre de propriété, notamment l'Attestation de Détention Coutumière (ADC). A l’approche de cette date, dans les villages, l'inquiétude est grande, les populations paysannes sont affolées. De partout, ça grogne.


Dans l’effort de répondre à ces préoccupations, le Directeur Général de l'Agence Nationale du Domaine et du Foncier (ANDF), Jules Victorin KOUGBLENOU est intervenu le vendredi 14 juillet 2023, sur le plateau de Télévision de la chaîne Nationale. Il a déclaré : « Le gouvernement n'entrevoit pas prendre les terres des gens... Aucun texte n'a prévu la conversion systématique des biens fonciers des citoyens dans le patrimoine de l'Etat. » Mais dit le D. G. de l’ANDF, « à l’expiration de la période transitoire prévue par le Code foncier et domanial, toute personne qui prendra l’initiative de vendre un terrain bâti ou non, doit s’assurer que lui-même dispose d’un titre foncier. Autrement dit, il doit se faire établir un titre foncier avant de vendre. » (Cf. Le Matinal n° 6630 du 17 juillet 2023)


Si on sait que l’obtention du titre foncier est un parcours de combattant sans issue pour la majorité des propriétaires terriens que sont les paysans analphabètes, on est en droit de dire que l’Etat a fait main basse sur les terres des populations qui n’ont plus le droit de vendre.
Et ce ne sont pas les « assouplissements » prévus par la loi et que nous déclame le DG de l’ANDF qui changent fondamentalement quelque chose. En effet, ledit assouplissement consiste en ce que : « A défaut de la confirmation des droits fonciers, le vendeur devra, préalablement à la transaction, obtenir auprès de l’ANDF, un Certificat d’Appartenance dont le délai de validité mentionné au bas dudit document est d’un an non renouvelable…, et il ne peut être délivré qu’autant qu’un dossier d’obtention de titre foncier ait été régulièrement enrôlé sur le terrain concerné par les services compétents de l’ANDF » (Cf. Le Matinal)
Autrement, la grande majorité des propriétaires terriens, les paysans ne peuvent plus vendre librement leurs biens immobiliers. L’Etat a fait main basse là-dessus.


Pour justifier cet état de choses, le pouvoir parle de lutte contre les ventes frauduleuses de parcelles. Oui, il y en a et il est juste de vouloir les combattre. Mais toute la bureaucratie qui soumet le paysan à des procédures complètent insondables par lui revient à le déposséder. Tout le monde sait que l’obtention du titre foncier ou du certificat d’appartenance ou de l’Attestation de Détention Coutumière n’aboutit qu’à des tracasseries administratives qui durent souvent des années, alors que la nécessité de vendre une parcelle répond à des urgences : soins de santé, écolage, formation professionnelle ou universitaire, constitution d’un fonds de commerce ou règlement de litige, cérémonies familiales, etc. Ensuite, les taxes excessives pour l’obtention de ces pièces, généralement hors de portée des paysans pauvres, grèvent tout gain possible. A la fin, cette réforme met le propriétaire paysan à la merci de riches acquéreurs, des hauts bourgeois.


La lutte contre la fraude notamment foncière peut être faite efficacement par le contrôle à la base. L’Etat, à ce titre a expérimenté avec succès l’efficacité des comités villageois de gestion foncière. Pourquoi, ne pas donner le pouvoir, à ces niveaux de proximité et de connaissance réelle des propriétaires terriens et la délivrance à ces niveaux des certificats d’appartenance ? Moins de tracasseries, moins de taxes, moins de soucis, plus de sécurité !
Face à tout cela, il faut encore surseoir à l’application du Code foncier et du domaine, prolonger les délais de sa mise en œuvre et procéder à la suppression des mesures bureaucratiques et des taxes excessives.
Rapt R.

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