ADRESSE XXV
UNE BATAILLE DE PERDU, MAIS L’ESSENTIEL RESTE A VENIR.
Béninoises, Béninois de l’Intérieur et de la Diaspora.
Mes Chers Compatriotes !
Installer ! Ne pas installer ! Va-t-il aller jusqu’au bout du forfait en installant l’Assemblée illégitime ? Telle se posait la question lancinante dans le cœur de la plupart des Béninois. Et en effet, cela a eu lieu à Porto-Novo le 16 Mai 2019. L’Assemblée-Croupion, Gouvernement-bis de 83 Députés- Fonctionnaires a été installée. Et dans quelle ambiance ! Un parlement installé sous des barbelés et des armes de guerre dirigées contre le peuple avec déploiement de forces militaires d’élite de combat comme les para-commandos descendus de Cana et dans une Ville, notre Capitale sous état de siège ! « Des représentants du peuple », protégés du peuple par les armes comme tout autant coupés des Représentants des Peuples des autres pays dont aucun n’a daigné honorer de sa présence, une cérémonie aussi ignoble !
Voilà nous y voilà. La deuxième institution de souveraineté (l’Assemblée nationale) fondue dans la première, le Gouvernement. Nous sommes en plein dans la Dictature autocratique ! Adieu la Démocratie au Bénin. Il ne s’agit point de se voiler la face. Il s’agit de reconnaître que notre peuple, au bout d’un long combat (qui a connu des péripéties dont les dernières ont des dates-jalons tels 21 au 26 février, 28 Avril, 1er et 02 Mai 2019), vient de perdre une bataille, la bataille de la démocratie.
Béninoises, Béninois de l’Intérieur et de la Diaspora.
Mes Chers Compatriotes !
Le peuple béninois vient de perdre une bataille. C’est incontestable !
Et c’est ce que reconnaissent maintes voix avec des sentiments divers, allant du désespoir avec appel à Dieu à l’appel à la communauté internationale. On peut lire : « Jeudi noir sur le Bénin, la chape de plomb est tombée. Malgré notre posture alerte…Nous avons baissé la garde, convaincus qu’une telle blague ne pouvait prospérer. Erreur. Ceux qui nous ont mis en esclavage puis colonisées sont aussi cyniques que Mammon. A l’heure où j’écris ces mots, je ressens l’amertume de toutes les forces progressistes de notre peuple et sa jeunesse en particulier matraquée, traquée, abusée, muselée qui assiste désemparée au crépuscule de notre démocratie, à la décadence de ce qui jusque-là faisait notre richesse fondamentale, sinon la seule : la démocratie, le consensus national, la liberté dans la paix ». Et cette autre réaction, sous le titre de la « République bottée » : « Des représentants du peuple retranchés derrière des canons et des armes automatiques. Tout un symbole ! » Toutes les deux réactions concluent à la nécessité de la lutte pour s’en sortir « Mais le jour se lèvera. Il est impérieux de réparer ce déshonneur à court et moyen terme ». « Il n’est guère temps de lamentations… Une leçon est sue : une révélation est faite. La République est morte, vive la réplique ».
Eh oui vive la Réplique ! C’est le mot d’ordre.
Béninoises, Béninois de l’Intérieur et de la Diaspora.
Mes Chers Compatriotes !
Pour une juste réplique, pour « réparer ce déshonneur à court et moyen terme », il faut situer les causes de la défaite actuelle de la démocratie. Et pour cela, il y a des enseignements à assumer et des choses à comprendre.
1°- Ce qu’il faut comprendre, c’est que les bases de notre démocratie issue de la conférence nationale de février 1990 étaient fragiles et trompeuses. Elles étaient fragiles en ce sens que tout en consacrant les libertés formelles ainsi que l’alternance au pouvoir, la Conférence nationale n’a pas résolu la question aussi existentielle que celle de l’impunité des criminels politiques et des détrousseurs des biens publics ; que de ce fait, elle a fait de l’argent, le maître de tout processus électoral au Bénin où les postes électifs sont vendus au plus offrant, à la criée et à la bourse des valeurs boursières électorales ; les Chefs des Partis haut-bourgeois sont devenus des Chefs d’entreprises de Placement à divers postes électifs et même nominatifs (députés, conseillers maires, ministres etc.) Une fois l’argent payé, tout le reste marche comme sur des roulettes : les distributions de sous dans les maisons les veilles des scrutins, les structures administratives locales, la CENA, la Cour Constitutionnelle sont mises à l’œuvre et tout est réglé comme dans un orchestre. Le vote du peuple dans tout cela ? Du pipo ! De ce fait, la démocratie béninoise, en dehors des libertés formelles, depuis longtemps est factice. Alors, on continue de vendre à l’international, un emballage qui ne correspond plus à son contenu. C’est cet emballage qui vient de se fondre au grand jour. Il faut comprendre qu’avec un tel système où l’Argent est Roi, la voie est balisée pour des aventuriers, même à tête vide et sans programme, pourvus d’argent, pour accéder au pouvoir. C’est dire que le phénomène TALON, le ploutocrate s’accaparant du pouvoir au Bénin, n’est pas tombé du ciel ; il est le produit et un acteur du système.
2°- Ce qu’il faut comprendre, c’est que les grands tenants du Renouveau démocratique se sont évertués pendant trente ans, à falsifier l’histoire, à faire accroire que la Conférence de 1990 et les libertés sont tombées du ciel de sorte à effacer de la mémoire du peuple et des jeunes générations, les personnes dont l’action déterminante et les sacrifices ont permis de faire le pas de 1989-90 et à détruire méthodiquement à travers ces symboles emblématiques, les valeurs qui ont permis de vaincre la première autocratie celle de Kérékou-PRPB : l’esprit de sacrifice, la bravoure, la générosité, le don de soi pour la patrie. Ils se sont évertués à les remplacer par les valeurs négatives : l’arrivisme, la facilité, la lâcheté, l’esprit de trahison pour de l’argent. Conséquence, c’est l’instrumentalisation du peuple notamment de la jeunesse, des femmes tout juste bonnes à être utilisées comme du bétail électoral à coup de sandwich et de tee-shirt distribués à l’occasion des campagnes électorales. Ce qui fait qu’à l’heure des combats contre l’assaut autocratique, les appels pressants aux masses du peuple à se mettre dans les rues n’ont pas reçu les échos à la hauteur de l’enjeu.
3°- Ce qu’il faut comprendre enfin c’est que les méthodes préconisées et mises en œuvre pour combattre l’autocrate Talon ne sont pas à la hauteur d’un pouvoir autocratique. On ne défait pas une autocratie par les urnes. Face à l’appel aux marches, au consensus, au dialogue, à la concession, face à l’appel au respect de la Constitution et des lois démocratiques, en un mot face aux méthodes démocratiques, etc. Talon déroule son arsenal dictatorial (déploiement des chars, arrestations de centaines de personnes, mise en résidence surveillée d’un ancien Chef d’Etat, tirs à balles réelles tuant de nombreuses personnes et occasionnant de nombreux blessés.) L’inadéquation des méthodes et des rapports de forces est évidente. Leçon principale : seule l’action populaire autonome et déterminée, arrive à vaincre une autocratie.
Béninoises, Béninois de l’Intérieur et de la Diaspora.
Mes Chers Compatriotes !
Une bataille de perdu, mais l’essentiel reste à venir. Les armées vaincues sont à bonne école et apprendront rapidement de leurs erreurs pour vaincre.
QUE FAIRE ?
La première des choses, c’est de se mettre à l’œuvre, sans lamentation ni découragement aucun ; de poursuivre de façon résolue et déterminée le travail de formation et de renforcement partout des Comités de Résistance et d’Action (CRAC) tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays. Que tous fassent preuve d’humanisme et de patriotisme en allant en aide à toutes les victimes de l’autocratie, en apportant aux combattants sur le terrain et de mille manières, tout concours possible.
La deuxième chose est de savoir qu’avec ces 83 députés-godillots, les Lois qui sortiront de l’hémicycle de Porto-Novo désormais, encore plus que par un passé récent, seront des lois injustes, des lois oppressives, des lois tyranniques. Le Président de la nouvelle Assemblée, Louis Vlavonou, n’est-il pas celui-là même qui a initié des lois fascistes comme la loi contre la grève des travailleurs et la Charte des partis politiques ?
Quand la loi cesse d’être l’expression de la volonté générale et devient l’expression de la Volonté d’un clan pour ne pas dire d’un Individu, quand la loi devient oppressive, le droit du peuple est de la combattre par toutes voies légitimes. C’est là la condition de la paix dans un pays. C’est dire que l’expression de la démocratie est plus que jamais en dehors des Institutions. Comme dit l’autre, « l’Histoire politique du monde témoigne de ce qu’aucune démocratie digne de ce nom ne s’est constituée sans les expressions de la rue, sans ses turbulences et ses transpirations, sans la contestation, et en dehors des mobilisations diverses des peuples prenant d’assaut la rue publique pour porter leur parole, parfois cacophonique, souvent hétéroclite et incoordonnée, mais toujours plurielle et légitime…Les peuples au fil des siècles, par-delà le temps et l’espace, ont eu recours à la rue comme lieu et moyen d’expression, pour revendiquer une meilleure participation dans la gestion de la chose publique, pour une extension de l’espace des libertés et une réalisation effective du développement et de la démocratie ». Sous nos yeux, les peuples algériens et soudanais nous en montrent les exemples. Notre peuple, fier de ses expériences, sera à la hauteur de la situation.
Enfants du Bénin debout !
La Victoire est plus proche qu’on ne croit.
Cotonou, le 20 Mai 2019
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