DECLARATION
A PROPOS DE LA VIE ET DU CADRE DE VIE, DU PAIN ET DU PAVE :
MEPRIS, MENSONGES ET DUPERIE DU PEUPLE
Depuis un certain temps, une propagande tonitruante est amorcée par le pouvoir de TALON. Limitée d’abord au niveau des cercles le soutenant aveuglément, cette propagande consiste à parler et louer abondamment les travaux d’asphaltage et des infrastructures. Dans ces cercles, on parle du rattrapage du retard depuis les années 1960, comme si le Bénin souffre principalement et fondamentalement de ce retard. L’onction des évêques du Bénin, qui dans le compte rendu de leur dernière conférence épiscopale tenue du 07 au 10 janvier 2020, « notent avec satisfaction la mise en œuvre du programme de développement des infrastructures notamment l’asphaltage qui modifie qualitativement le visage de plusieurs localités de notre pays », a donné comme le départ de la campagne ouverte du pouvoir, par TALON lui-même. Dès la publication de cette onction épiscopale le 10 janvier 2020, TALON qui méprisait et ridiculisait les sorties publiques, est entré en campagne "électorale" le 12 janvier 2020, sous couvert de tournées de supervision des projets phares. Après Akpakpa à Cotonou le 12 janvier, c’est le village Avlékété qui est visité le 14 janvier. Pour le pouvoir et ses soutiens, il est question de parler abondamment de l’amélioration du cadre de vie, de la modernité des villes, de la modification qualitative du visage de plusieurs localités, en opposition et/ou en réponse aux conditions dégradées, à la faim et la misère des masses à qui on continue de demander la patience et de promettre des lendemains qui chantent.
Cette propagande pose alors la question de la vie face à l’amélioration du cadre de vie, du problème du pain et du pavé.
Le pouvoir a choisi, lui, d’opposer à la vie des citoyens et du peuple, l’amélioration du cadre de vie, d’opposer à l’exigence du pain, l’asphalte ou en clair, le pavé. Cela le dédouanerait et lui permettrait d’avoir la caution de ceux-là qui n’ont pas faim ou qui vivent de la faim des masses et du peuple.
Face à cela, essayons tout d’abord, de replacer ces travaux dans leur temps et juste mesure, et ensuite regardons le parcours du pouvoir pour voir la liste des atteintes aux conditions de vie du peuple.
1- Les pouvoirs passés, depuis 1990 notamment, ont mis pratiquement leur priorité au développement des infrastructures routières. Sous SOGLO, il a été initié le pavage des voies et c’est à lui que l’on doit le pavage de l’essentiel des grands axes de Cotonou. Cela a continué sous KEREKOU 2 et 3 avec l’assainissement des villes, Akpakpa par exemple à Cotonou. C’est ainsi que Cotonou n’était plus "Cototrou". Il a été également démarré la construction des routes transversales du pays, Parakou-Djougou-Natitingou, Aplahoué-Bohicon-Kétou, Kandi-Banikoara, etc. Le pouvoir de YAYI a continué dans le même sens en clamant que « la route du développement passe par le développement des routes ». Tel était le refrain chanté par KOUPAKI, le super ministre de YAYI-TALON qui résumait et réduisait le développement aux investissements dans les travaux publics. La double voie 2x2 Cotonou-Ouidah, la voie Allada-Tori-Ouidah, Pahou-Tori, Comé-Bopa-Zoungbonou, Porto-Novo-Adjohoun-Ouinhi-Cové, le troisième pont de Cotonou, les doubles voies vers l’aéroport, la double voie traversant Calavi-Akassato, les échangeurs, autant d’infrastructures routières et de pavage avant l’arrivée de TALON au pouvoir.
2- Comme, on peut le voir, c’est sur les épaules des précédents que TALON essaie de se hisser avec force mystification comme il sied à tout pouvoir autocratique et pour lequel toute action est clamée inédite, du jamais vu au Bénin, même nulle part au monde ! Une fois les axes principaux tracés et pavés par ses prédécesseurs, les bouts de tronçons qu’entame le pouvoir de TALON et sélectionnés, dans la majorité des cas, sur la base d’on ne sait quel critère en matière de mobilité, ne méritent exultation que de la part des courtisans ou de ceux-là qui n’ont pas suffisamment réfléchi aux véritables problèmes de développement du pays. Présenter l’asphaltage, en fait la poursuite du pavage des rues, comme le levier du développement constitue au mieux, un mirage aux alouettes. Pire et plus grave, opposer aux exigences pour la vie, voire de la survie du peuple qui a faim, ce mirage de l’asphaltage parce qu’il améliore le cadre de vie, constitue une collusion avec le pouvoir affameur. Regardons alors, comme dit plus haut, la liste des atteintes aux conditions de vie du peuple par le pouvoir de TALON depuis son arrivée.
3- Sur le plan matériel, des milliers d’emplois ont été supprimés avec la liquidation des entreprisses publiques : SONAPRA, ONS, CARDER, BENIN Télécoms, etc. Des centaines de milliers de petits revendeurs des rues et des marchés dans les villes ont été brutalement et sauvagement déguerpis et leurs outils de travail (et donc de survie) saccagés sans aucun accompagnement et sans alternative depuis janvier 2017. Les entrepreneurs nationaux non soumis au clan au pouvoir sont exclus des grands marchés d’Etat et pire, harcelés et pourchassés par des redressements fiscaux. Ils ont même peur de réussir et de prospérer par crainte de s’attirer davantage de tracasseries de la part des hommes d’affaires au pouvoir qui imposent leur monopole privé dans tous les secteurs vitaux et rentables du pays. Conséquence logique : le chômage et le sous-emploi ont grimpé au sein de la jeunesse, laissée sans perspective et dans le désespoir.
4- Au niveau des salariés, du secteur public comme du privé, depuis quatre ans, les salaires nominaux sont restés stagnants ; aucune augmentation du SMIC ou du point indiciaire, alors que les besoins sont multipliés. Pire, sous couvert d’assainissement, des primes des fonctionnaires ont été supprimées pendant que les dignitaires (ministres, directeurs et secrétaires généraux des cabinets, DG des agences présidentielles, collaborateurs extérieurs, etc.) ont eu leurs rémunérations multipliées. Face à la baisse du pouvoir d’achat des salariés, les artisans, les vendeurs et vendeuses dans les marchés, sont confrontés à la rareté des commandes et à la mévente. Sur tout le peuple affamé, les taxes continuent de pleuvoir, sur les routes, sur les ateliers. La taxe civique est en voie de rétablissement à la campagne sous le couvert de la taxe sur les habitations rurales dans les villages. Conséquence : la faim tenaille le peuple, difficile de s’assurer les trois repas par jour.
5- Les réformes entreprises par le pouvoir autocratique et destinées à détruire le secteur public au profit de monopoles privés ont saccagé le secteur social. L’Ecole publique n’est plus que l’ombre d’elle-même. Les classes pléthoriques suite à la suppression et la fusion des classes et écoles offrent le spectacle de jeunes enfants entassés à plus de cent devant un maître impuissant. Des centaines de classes demeurent sans maître. Dans l’enseignement secondaire, des milliers d’élèves n’ont pas composé aux épreuves d’évaluation trimestrielle dans certaines matières faute d’enseignants dans ces matières. Aujourd’hui, il est question de remettre à la sous-traitance de monopoles privés, la sélection, le recrutement et la gestion de la grande majorité des enseignants du secteur public au primaire et au secondaire, sans égard à la carrière de ces enseignants. On aura achevé la destruction de l’Ecole publique et l’hypothèque de l’avenir des jeunes générations du pays.
6- La réforme à la santé a conduit, entre autres, à la fermeture de centres de santé publics des villages dès 18 heures, obligeant les populations à se rendre dans les hôpitaux de zone pour les urgences qui surviennent les soirs et la nuit, avec des coûts plus élevés de transport et de consultation. Dans les grands hôpitaux de référence, des équipements élémentaires et vitaux comme la radio restent en panne pendant des mois. On assiste à des scènes horribles de patients et de leurs parents retenus pendant des jours, voire des mois dans l’enceinte de ces hôpitaux faute de moyens pour payer les factures à la fin des soins. Ainsi, des mères n’ont été délivrées, elles et leurs bébés, de l’Hôpital de la Mère et de l’Enfant (Homel) à Cotonou qu’après le paiement de leurs factures par des bonnes volontés.
7- La fermeture des frontières par le Nigéria a aggravé la situation ces derniers mois. Outre les répercussions sur nombre de gros et moyens exportateurs de produits locaux ou importés, (ce que l’on désigne sous l’appellation de la classe moyenne), beaucoup d’ouvriers et de petits producteurs sont directement frappés. Les ouvriers agricoles dans les plantations maraichères dont les produits ne passent plus, des milliers de dockers et les tâcherons de dépotage des containers, suite à la chute de l’activité du Port autonome de Cotonou, sont réduits au chômage et leurs familles précipitées dans la misère noire. Le coût du carburant vendu dans les rues, qui a augmenté et se stabilise à plus de 40% (500 frs au lieu de 350 frs le litre) au-dessus de sa valeur d’antan, assèche le pouvoir d’achat de tous les consommateurs du pays. Le pouvoir qui tire davantage d’impôts sur le carburant à cause de l’afflux dans les stations formelles, n’a décidé d’aucune mesure pour soulager les producteurs. Pire, comme gêné par les accusations qui fusent sur les réseaux et relatives aux raisons de la fermeture des frontières, aucune communication d’aucune autorité à un quelconque niveau du pouvoir (présidence, gouvernement, assemblée nationale) sur le sujet n’est faite à l’endroit du peuple. Ce dernier ne peut que voir son angoisse augmenter, car ne percevant aucune issue favorable à l’horizon.
8- Une des conséquences, au plan social, « la consommation excessive de l’alcool par une frange importante de la jeunesse de notre pays » et dont se préoccupent les évêques et le haut clergé, sans relier cette dégénérescence morale comme prolongement et conséquence de la dégénérescence physique du peuple causée par la politique du pouvoir de TALON depuis près de quatre ans. C’est bien connu : tout individu, et a fortiori toute une couche sociale, ne se met à consommer excessivement de l’alcool que par désespoir en pensant noyer ainsi ses soucis et échapper à l’angoisse de la vie quotidienne.
9- L’amélioration du cadre de vie apparaît ainsi nettement ne pas être une solution à ce désespoir de la jeunesse, au contraire : les rues asphaltées au quartier des fortunés, les Cocotiers à Cotonou par exemple, lui renvoient au visage sa galère et sans autre perspective que le chômage, ou au mieux pour les rares chanceux, les stages et les contrats à durée déterminée sans fin à la merci des employeurs qui peuvent licencier comme bon leur plaît avec des indemnités de misère. Et ce n’est pas seulement l’alcoolisme qui a augmenté, mais également les dépravations des jeunes filles de même que les cambriolages et braquages dans les campagnes. On assiste à ces faits significatifs des voleurs qui ne se contentent plus seulement des récoltes dans les champs ou des équipements dans les maisons, mais emportent les marmites de sauce ou de pâte.
10- Du reste, le peuple béninois étouffe sous la dictature autocratique. Les libertés de presse, d’expression, d’association, de manifestation, le droit de grève, sont pratiquement supprimées. Les radios et organes de presse non soumis au pouvoir sont fermés. Le pouvoir et ses laudateurs "klébés" peuvent mentir sans craindre des contradicteurs publics officiels. Si ce n’est sous le couvert d’attroupement non armé, c’est sous le couvert d’infractions sur les réseaux numériques que tout jeune peut être arrêté, jugé et emprisonné pour des mois, voire des années. Les brimades sont quotidiennes dans toutes les couches populaires, entraînant des faits inédits dans notre pays, comme ce suicide le 31 décembre 2019 d’un policier avec son arme de service au Port Autonome de Cotonou.
11- L’amélioration du cadre de vie par un pouvoir n’améliore la vie que lorsqu’il place concomitamment la vie des hommes au centre de ses actions. Le pavé ne remplace pas le pain si la vie des hommes n’intéresse pas avant et après tout. TALON a beau dire, comme à ce dignitaire du village d’Avlékété le 14 janvier 2020 qu’un Chef ne peut pas vouloir du mal de ses administrés, force est d’observer que son pouvoir, depuis son arrivée, le fait. Du reste, n’a-t-il pas dit qu’en toute chose, il pense d’abord à lui-même ? N’a-t-il pas dit et répété à maintes occasions, sous des nuances diverses et sous forme de défi insolent, que le peuple peut souffrir de sa politique, mais le peuple ne pourra rien faire contre ? N’a-t-il pas pris à cet effet les lois les plus scélérates pour tenter de museler le peuple, les salariés, la jeunesse ? N’envoie-t-il pas régulièrement non seulement la police, mais l’armée contre le peuple ? Un Chef qui ne veut pas du mal à ses administrés, n’envoie pas l’armée contre des manifestants à mains nues.
12- Ce qu’il a été donné au peuple de vivre, et à tout observateur impartial de voir, c’est l’accaparement de tous les secteurs vitaux de l’économie par le Chef de l’Etat et ses proches hommes d’affaires : le coton dès le premier conseil des ministères et la diminution des taxes à l’exportation de 60 à 10 francs le kg ; le PVI et le partage léonin des taxes de transit et de tracking au profit de Bénin-control ; le contrôle direct de toutes les agences d’Etat et par conséquent l’attribution des marchés d’Etat par la Présidence de la République et conclus dans l’opacité. Ce qu’il a été donné au peuple d’observer ainsi qu’à tout observateur impartial, ce sont les coûts exorbitants de certaines infrastructures comme le kilomètre d’asphaltage à plus de 1,5 milliard, voire plus de 2 milliards à Lokossa. Ce sont les procès et détentions arbitraires pour corruption réelle ou inventée des opposants et petites gens, pendant que les surfacturations, les vols et graves méfaits constatés dans les cercles et soutiens du pouvoir restent impunis. Ce faisant, ce n’est pas au peuple que l’on pense, mais à ses intérêts personnels, à ceux du clan ainsi qu’à ceux de ses associés des puissances étrangères.
13- Pour finir, le pouvoir rattache la construction des routes et voies au développement du tourisme, présenté comme le socle et centre du projet de développement du pays. On cite la réalisation de cités balnéaires. Dans aucun pays, le tourisme n’a constitué le levier de développement durable, tant n’importe quelle crise, climatique, sanitaire, politique, sécuritaire devient un handicap. Près de nous, au Togo, Eyadema se vantait de réaliser le développement du pays sur la base du tourisme. Des hôtels, "2 Février", "Sarakawa", "Golfe", etc ; mais le pays demeure toujours sous-développé. C’est la production matérielle diversifiée, industrielle qui constitue le socle qui sous-tend le développement du tourisme avec le tourisme national. Incapable de réfléchir et surtout de mettre en œuvre une politique économique qui rompt avec le pacte colonial, TALON nous sert le mirage du pays à vocation touristique, comme avant lui, on nous avait servi le mirage du pays à vocation agricole, du pays de transit, etc. Autant de concepts qui servent à maquiller et prolonger la soumission au pacte colonial. TALON mieux et plus que tous ses prédécesseurs s’en sert pour se servir d’abord lui-même et couvre la destruction de la vie du peuple et de la jeunesse par le mirage de l’amélioration du cadre de vie. Et ses laudateurs l’y aident et l’encouragent.
Mais le peuple n’est pas dupe.
Cotonou, le 17 janvier 2020
Le Parti Communiste du Bénin