Personne ne peut se réjouir de la mort de quelqu'un; mais la tartuferie ambiante depuis la mort de KEREKOU est une injure à la mémoire des martyrs de tous ses régimes. C'est ce que rappelle ici le professeur Philippe NOUDJENOUME.
MESSAGE DE PHILIPPE NOUDJENOUME
à l’occasion du décès du Général Mathieu KEREKOU
La nouvelle du décès de Mathieu Kérékou a été pour moi une surprise en même temps qu’elle m’inspire de la tristesse. Et à cette occasion, mes pensées vont à toute sa famille qui pleure aujourd’hui un être cher. La tristesse, parce qu’il s’agit quand même de l’homme qui a présidé aux destinées de ce pays pendant près de trois décennies et qui s’en est allé emportant avec lui tout un pan de l’histoire de notre pays. Mais ma tristesse a été surtout grande qu’il ait pu disparaître sans devoir répondre de tous les crimes commis sous ses différents pouvoirs de 1972 à 2006. Car le Général Mathieu KEREKOU, il ne faut pas l’oublier, c’est l’homme des geôles de Ségbana, des lieux de tortures de PLM Alédjo, PCO camp Guézo et du Petit Palais etc. C’est celui qui a abattu froidement son Ministre de l’Intérieur, Michel AIKPE et a exposé à la vindicte populaire sa propre épouse, alors enceinte de lui et ce pour raison politique. C’est celui-là qui a fait tirer froidement sur le jeune élève Atchaka Parfait du CEG Gbégamey, qui a assassiné Luc Togbadja etc. La liste des crimes de sang est longue.
Mathieu Kérékou, c’est aussi la destruction systématique du tissu économique du pays .Il en fut ainsi de 1972 à 1989. Le régime de Soglo a essayé de ce point de vue pendant les 5 ans de recoller les morceaux. Quand il revint pendant les dix années suivantes, de 1996 à 2006, il a tout vandalisé, semant son règne de scandales économico-financiers divers : 1es scandales : Affaire HAMANI- affaire SONACOP, affaire PANOCO, affaire KOVACS, affaire TITAN etc.
Avec Mathieu Kérékou, c’est la destruction de l’école et de la culture.
Enfin Kérékou, c’est l’incarnation du chantage et de l’impunité. Pour éviter d’être jugé et sanctionné, Kérékou sous menace des armes, battu aux élections présidentielles par Soglo en 1991, recourut au chantage odieux pour arracher l’immunité personnelle votée par le HCR en avril 1991. Tout le monde voit que ce qui constitue le fléau qui plombe le Bénin et qui l’a entraîné dans les enfers où il est actuellement, c’est l’impunité et cela est incarné par Mathieu Kérékou. Le modèle est ainsi campé. Chaque pouvoir commet ses crimes et est assuré d’être impuni. L’impunité des crimes politiques et de sang, l’impunité des crimes économiques, tout ce qu’on vit maintenant voilà le système Kérékou. Le pouvoir de YAYI Boni avec ses multiples crimes politiques et économiques, c’est Kérékou. C’est d’ailleurs lui qui l’a adoubé par dribble en 2006 et nous l’a imposé prolongeant ainsi l’agonie de notre peuple.
Je sais qu’étant le père politique de la plus grande partie des hommes de la classe dirigeante de notre pays actuellement, l’on sera saoulé pendant des jours, sur les mass media d’un vacarme assourdissant de louanges de toutes sortes. Mais la vérité est têtue. Mathieu Kérékou, c’est la morale du crime, du mensonge, de la duplicité et de l’imposture. Bref un contre-modèle à combattre. Mon profond regret, c’est qu’il n’ait pas répondu de tous ses actes avant de nous abandonner.
Cotonou, le 15 Octobre 2015
Philippe NOUDJENOUME