Manifestations contre le projet de loi de réforme des retraites en France :
Macron en déphasage avec son peuple
Depuis un moment toutes les villes de la France s’embrasent contre le projet de réforme du système des retraites. Le projet indique que l’âge légal à partir duquel il est possible de partir à la retraite sera progressivement relevé à compter du 1er septembre 2023. Il sera ainsi fixé à 63 ans et 3 mois en 2027 à la fin du quinquennat, puis atteindra la cible de 64 ans en 2030.
Ce projet de loi déclenche un mouvement social inédit à partir de janvier 2023. Une unité d’action se noue avec une intersyndicale regroupant presque toutes les centrales syndicales des salariés qui programme des journées d’actions pour le retrait pur et simple du projet. Et pratiquement chaque semaine, des centaines de milliers de Français sont dans les rues à Strasbourg, Brest, Lille, Nantes, Rennes, Grenoble, Paris, etc. Des manifestations rassemblent des millions de personnes. Devant la surdité du Gouvernement, après les grèves et manifestations de rue, les ouvriers entament des blocages dans les raffineries, sur les voies. Des stations d’essence sont à sec pour la première fois depuis le début des mouvements. Les éboueurs maintiennent la grève depuis des semaines entrainant l’amoncellement des poubelles dans les rues de toutes les grandes villes.
Pendant les manifestations, s’exprime la volonté du peuple avec des banderoles et pancartes sur lesquelles il est inscrit « Augmentez les salaires, pas l'âge de départ à la retraite », « Plus de retraités joviaux, moins d'évadés fiscaux ».
Ces manifestations gigantesques sont l’expression du rejet de ce projet de loi par la majorité des Français. Selon les sondages, plus de 70 % des Français étaient opposés fin février au projet de loi et actuellement ce chiffre atteindrait plus de 80 %. L’isolement du pouvoir à l’Assemblée nationale s’est davantage creusé avec le rejet du projet par des députés du parti Les Républicains dont les candidats avaient pourtant fait campagne pour la retraite à 65 ans.
N’étant plus assuré de l’adoption du projet par une majorité de députés à l’Assemblée nationale et ne voulant pas renoncer à sa loi, le Gouvernement de Macron fait recours à l’article 49 alinéa 3 de la Constitution, qui au lieu de faire voter les députés sur la loi, décrète l’adoption de la loi en engageant sa responsabilité devant le Parlement. Cette disposition qui permet de déplacer le vote sur une loi en un vote pour ou contre le Gouvernement tout entier est une perfidie qui permet le « passage en force » de la loi querellée. Dans le cas d’espèce, après le mépris de la volonté du peuple manifestant depuis des semaines dans la rue, le mépris des députés, des représentants du peuple, le recours à l’article 49.3 est très mal vécu. La colère populaire déborde.
Dès l’annonce du 49.3, des manifestations spontanées éclatent à Paris et dans plusieurs villes. D’une crise sociale, on passe à une crise du système de représentation parlementaire. Le mouvement s’étend à d’autres secteurs. Les étudiants et lycéens entrent dans le mouvement.
Le lundi 20 mars 2023, après le scrutin lors duquel il n’a manqué que neuf voix pour renvoyer le Gouvernement par censure, l’intersyndicale et la CGT appellent à amplifier la mobilisation, à prendre toutes les initiatives dans les entreprises, les administrations et les lieux de vie, pour porter, encore plus nombreux et plus fort, le rejet de la réforme des retraites. » L’Intersyndicale a appelé à une nouvelle journée d’action pour le jeudi 23 mars, très suivie.
Après le rejet de justesse de la motion de censure pour déchoir son gouvernement, Macron est obligé de s’expliquer. Reçu en interview le mercredi 22 mars 2022 dans les éditions de 13 heures de « TF1 » et « France 2 », il ne dit rien de concret et tient des propos qui révoltent davantage les Français. Il a déclaré : «Qu’avant la fin de l’année la réforme entre en vigueur, s’il faut endosser l’impopularité, je l’endosserai, la réforme va poursuivre son chemin démocratique ; cette réforme, ce n’est pas un plaisir, ce n’est pas un luxe, c’est une nécessité. Que la foule n’a pas de légitimité face aux élus ». Ces propos méprisant la volonté exprimée du peuple est ressenti comme une véritable provocation à relever par le peuple en colère.
La journée d’action du jeudi 23 mars a rassemblé plus de 3, 5 millions de personnes dans les rues de toutes les villes. Même le ministère de l’Intérieur, qui minimise et pour cause, les chiffres de manifestants est obligé de reconnaitre qu’il y avait dans les rues de Paris trois plus de manifestants qu’à la dernière journée d’action. L’effectif des jeunes dans les manifestations était cette fois-ci particulièrement remarquable. La crise s’étend au-delà des seules revendications contre le projet de loi sur la les retraites.
Les affrontements éclatent contre la police qui s’évertue à disperser les rassemblements et réprimer des manifestants avec des lacrymogènes. Dans toutes les villes les manifestants sont aux prises avec les agents de la police. Plus de 292 personnes sont arrêtées et gardées à vue à la suite des interpellations.
Mais, dans les faits, toute la France est embrasée et la vie quotidienne est perturbée. La visite d’Etat du nouveau Roi d’Angleterre prévue pour les jours prochains est renvoyée pour plus tard. Le Président français est sur la braise pour son second mandat qui n’est qu’au début. Quelle que soit l’issue de cette crise, la France lui sera ingouvernable pour les quatre années à venir. Un grand fossé est créé entre lui et le peuple français qui est prêt à en découdre avec lui.
Toutes ces manifestations du peuple dans toutes les villes de la France depuis le lancement du processus de réforme de la loi sur les retraites indiquent que la France impérialiste de Macron traverse une crise politique et sociale sans précédent depuis la dernière décennie. Cette crise aux dimensions multiples montre le déclin de la France et traduit l’échec de la démocratie représentative. Il est clair que le peuple français n’a plus confiance aux institutions de la République et les hommes qui les animent. C’est ce qui justifie les manifestations à travers tout le pays pour contester l’ordre actuel. Pendant ce temps, on observe également que la France est rejetée et dénoncée à travers des mouvements patriotiques de plus en plus ascendants pour l’affranchissement de l’Afrique de sa domination.
Afi Tossou