EDITORIAL
L’achat des grands électeurs officiellement en oeuvre
Coup sur coup en ce début du mois de septembre, des fonds d’Etat ont été débloqués au profit des partis politiques, de l’Assemblée nationale et des maires, tous à la solde du Président Talon. Au total, près de 6 milliards. Si les prétextes de ces financements sont divers, les destinataires sont les mêmes, et principalement le parti unique à deux fourches (l’Union Progressiste de Bruno Amoussou et le Bloc Républicain de Abdoulaye Bio Tchané) qui détient tous les députés à l’Assemblée nationale et compte 71 des 77 maires du pays. Des miettes seront naturellement réservées aux traitres des FCBE de Hounkpè-Yarou qui sont les derniers à avoir rejoint le wagon présidentiel.
Personne ne se trompe sur l’objectif véritable de ces financements massifs. On est à moins de sept mois des élections présidentielles. Et le "candidat-suscité " pour un second mandat doit financer ses hommes pour sa campagne.
Hier, c’était de sa poche que l’homme d’affaires Talon finançait les campagnes électorales de ses obligés, qu’il manipulait par la suite pour l’accaparement des marchés et monopoles d’Etat. La pratique est tellement devenue visible qu’en 2015, mêmes les bénéficiaires ne pouvaient plus le cacher et ont parlé de « télécommandes pas toujours vertueuses ».
Hier, Talon était une télécommande de l’ombre, payant de sa poche la campagne des députés, des présidents, pour ses affaires. Aujourd’hui qu’il est lui-même Président de la République, la pratique continue. Mais la nature des fonds a changé. Ce sont les fonds publics qui sont maintenant officiellement et ouvertement mis au service de la campagne de l’homme d’affaires Président.
La télécommande est, cette fois-ci, visible. Elle n’est pas pour autant plus vertueuse. Au contraire ! Elle draine ici les ressources publiques toujours pour la corruption électorale en vue du renouvellement du pouvoir de dictature autocratique.
Le peuple saura, tôt ou tard, demander des comptes.
La Rédaction
Présidentielle de 2021
Talon finance ses hommes pour sa compagne
e 10 septembre 2020, le gouvernement de Patrice Talon a débloqué un milliard cinq cent millions de francs CFA (1.500.000.000FCFA) pour le financement des partis politiques. Ce déblocage fait suite au Décret n°2020-362 du 22 juillet 2020 portant financement des Partis politiques, dont le montant s’élève à trois milliards. Dans le cas d’espèce, la part du financement à recevoir au titre de l’année 2020 concerne les deux derniers trimestres et s’élève à un milliard cinq cent millions (1.500.000.000) FCFA.
Les partis éligibles à ce financement sont ceux disposant des députés à l’Assemblée nationale ou d’élus communaux ou municipaux. Or, seul le parti unique présidentiel officiel à deux fourches, l’Union Progressiste (UP) et le Bloc Républicain (BR) dispose de députés au parlement de sang mis en place après les élections législatives exclusives de 2019. En ce qui concerne les maires et conseillers communaux ou municipaux, ces partis sont au nombre de trois : les deux fourches (UP et BR) du parti unique présidentiel officiel et le parti FCBE de Hounkpè-Yarou connu comme le troisième bloc (officieux) de Talon. Au total, le financement prévu des trois milliards et le milliard cinq cent millions débloqués sont destinés à ces seuls trois partis, tous sous la tutelle de Patrice Talon.
Et ceci à sept mois des élections présidentielles pour lesquelles les campagnes pour un second mandat à l’autocrate Talon sont déjà lancées avec des « suscitations » et autres séances de mobilisation de la part de l’UP et du BR, ou pour son accompagnement par les FCBE. Les négociations sont déjà en cours avec les FCBE pour le parrainage afin de cautionner le caractère ouvert des prochaines élections présidentielles.
Ainsi, Talon finance les partis à sa solde pour sa campagne du second mandat.
Par ailleurs, dans le même temps, sous couvert de la lutte contre Covid-19, 650 millions FCFA sont alloués au Parlement de sang pour soi-disant le financement des mesures de riposte. Chacun des maires, également, est arrosé, sous le même prétexte, de plusieurs dizaines de millions FCFA à travers le Fonds d’Appui au Développement des Communes(FADEC). Le montant total reçu par l’ensemble des maires revient à plus de trois milliards huit cent millions (3.800.000.000) FCFA.
Or ces maires sont tous, à l’instar des députés à l’Assemblée nationale, des maires nommés par l’intermédiaire des trois partis cités plus haut. Et comme, il est connu que les Fons FADEC ont toujours été pillés impunément, et que la gestion à l’Assemblée nationale n’a jamais été orthodoxe et est régulièrement sujet à beaucoup de scandales jamais élucidés encore moins punis, les centaines de millions aux maires et à l’Assemblée sont encore des cadeaux offerts par Talon pour sa campagne.
Si l’on somme tous ces fonds débloqués à ses partis, à ses députés et maires, on a un total de plus de cinq milliards neuf cent millions de francs cfa.
Pendant que des milliards sont ainsi officiellement offerts aux partisans de Talon pour sa campagne, le peuple affamé doit faire face, sans recours, à la misère accrue par la crise de Covid-19. Aucune augmentation de salaire pour les ouvriers et travailleurs. Pire, des milliers de fonctionnaires en activité, de retraités, de prestataires de service à l’Etat attendent depuis des mois, voire des années le paiement de leurs dus. La vie, les affaires de ces citoyens ne font pas la préoccupation du dictateur autocrate. Il soigne et finance plutôt les grands électeurs que sont ces bras exécutants, les partis, les députés et les maires à sa solde pour sa campagne.
Abla Adan
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REGIME AUTOCRATIQUE DE PATRICE TALON
A PROPOS DE LA LETTRE DE CERTAINS COMPATRIOTES BENINOIS AU PRESIDENT MACRON
epuis quelques jours, un sujet fait débats. Il s’agit de la lettre adressée en date du 10 Septembre 2020, par quatre compatriotes béninois (Léonce HOUNGBADJI, Ganiou SOGLO, Bertin KOOVI, Omar AROUNA), au Président de la République française, Emmanuel MACRON, ainsi qu’à d’autres Chefs d’Etats sur la situation politique au Bénin.
L’objet de ce courrier est ainsi intitulé « Urgence maximale sur le grave recul démocratique au Bénin. »
Le débat tourne autour du caractère de cette lettre, du destinataire, de son fondement et de son opportunité dans le contexte politique actuel.
Beaucoup de compatriotes sont tombés à bras raccourcis sur cette initiative. Ce à quoi répondent avec autant de fureur les auteurs.
Il y a bien sûr les dignitaires de la Rupture qui montent au créneau pour la défense de leur politique autocratique et de prédation dans notre pays. Mais il y a surtout l’ensemble des démocrates-patriotes Béninois, représentants du peuple et défenseurs du patriotisme qui trouvent scandaleuse une telle démarche.
Quels sont les argumentaires justificatifs des auteurs ? « Notre démarche citoyenne, disent-ils, vise essentiellement à alerter davantage la communauté régionale et internationale sur le drame qui frappe le Bénin et son Peuple depuis le 6 avril 2016. La communauté régionale et internationale a besoin d’être informée et sensibilisée sur la gouvernance de Monsieur Patrice Talon. …. Nous avons le devoir d'attirer l’attention de la communauté régionale et internationale vis-à-vis de la situation en cours au Bénin, afin qu’elle prenne conscience des véritables dangers qui guettent le pays. Vous savez, en fermant la majorité de nos consulats et ambassades à l’étranger, Monsieur Patrice Talon cherche à attirer le rideau de fer sur notre pays, afin d’opérer dans l’opacité totale comme le font les malfaiteurs » (Cf. leur déclaration en date du 15 Septembre 2020). Ou bien « le courrier est adressé pas à la France seule mais à tous les pays développés et les pays africains afin que chacun sache ce qui se passe au Bénin depuis 2016. » Ou bien encore « Les soi-disant panafricains qui croient que le slogan va changer le monde sont invités aussi à brûler leur F CFA comme Kemy Séba, cessez d’utiliser le français… » Ou enfin, « vous n’avez pas bien lu la lettre…De grâce lisez bien et cessez de faire les panafricains. Vous mangez le riz, le blé, le sucre, le lait, la viande etc. importé et vous êtes panafricains.» Malheureusement les gesticulations justificatives tous azimuts des auteurs, le fait qu’il s’agisse de plusieurs destinataires, n’enlève rien au caractère incongru pour ne pas dire pro-colonial de la démarche. Les auteurs déclarent que le Président français n’est pas le seul destinataire de leur courrier. Qu’il y a beaucoup d’autres. Mais une interrogation se pose : Pourquoi c’est la seule correspondance adressée à Macron qui a fait l’objet de publication et pourquoi pas celles adressées aux autres destinataires ? Ou bien les autres ne sont-ils qu’ampliataires de celle du Président français ? Premièrement, nous ne sommes pas par principe, opposés à toute lettre au Président de la République française ; mais si nous nous adressons au Président français, ce n’est pas pour l’informer (et l’appeler à intervenir) sur la situation politique de notre pays (situation dont il est généralement le commanditaire final et dont l’informent à tout instant ses services diplomatiques et de renseignements), mais pour dénoncer (ou protester contre) les politiques qu’il mène contre les intérêts du peuple. Deuxièmement, qu’est-ce qui fait penser aux auteurs que la « communauté régionale et internationale » n’est pas informée de la situation qui prévaut dans notre pays ? Si des consulats et ambassades sont fermés, est-ce que l’ambassade française au Bénin est aussi fermée pour ne pas informer au jour le jour sinon d’heure en heure de la situation au Bénin ? Enfin déclarent-ils : « Vous n’avez pas bien lu la lettre…De grâce lisez bien et cessez de faire les panafricains » Le courrier est clair et limpide, sans ambiguïté et il ne faut pas être agrégé en quoi que ce soit pour comprendre ! Qu’y a-t-il de compliqué à comprendre lorsque l’on écrit à Mr Emmanuel MACRON, Président de la République française ceci : « Monsieur le Président de la République…Nous saluons votre engagement en faveur de la paix, la démocratie, l’Etat de droit et des Droits de l’Homme dans le monde. Raison pour laquelle, nous vous adressons cette lettre avec l'espoir d'attirer votre attention sur la situation désastreuse au Bénin. C’est un cri d'alarme…. Le Bénin risque inexorablement de s'éteindre…Notre désir de survivre à ces tragédies et de vivre dignement, nous laisse espérer que vous soutiendrez la population béninoise dans la lutte contre l’autocratie en place. Nous souhaitons que la grande démocratie qu’est la France, s'engage clairement dans la défense ferme et publique des principes démocratiques au Bénin. La France ne peut rester silencieuse devant les atrocités perpétrées par le pouvoir de Monsieur Patrice Talon, ni sur les graves atteintes portées aux libertés individuelles des Béninois. » Qu’y a-t-il de compliqué à interprétation dans les passages que voici : « Nous sommes des citoyens patriotes, engagés par amour profond pour notre Patrie et notre devoir est de vous alerter, non seulement du fait des liens historiques entre la France et le Bénin, mais également par rapport aux valeurs républicaines que vous défendez et qui sont les nôtres. Il est dans notre intérêt commun de sauver le Bénin, avant que le régime autocratique du président Talon n'apporte encore plus d'instabilité dans le pays et la sous-région.» Tout cela est clair. C’est ni plus ni moins un appel au Président français à sauver le peuple béninois des griffes du régime despotique de Patrice Talon pour la restauration de la démocratie au Bénin. Or, lorsque vous faites appel à une puissance pour qu’elle « s’engage clairement dans la défense ferme et publique des principes démocratique au Bénin » (sic), donc, pour intervenir ouvertement d’une manière ou d’une autre dans les affaires intérieures d’un Etat (a fortiori un Etat plus petit), vous l’autorisez à accroître sa domination sur cet Etat et cela s’appelle, « droit d’ingérence » ou « droit d’ingérence humanitaire », théorie au nom de laquelle les puissances impérialistes ont commis des crimes horribles à travers la planète. Le cas de l’invasion de la Libye par les armées franco-britanico-américaines en 2011, sous
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couvert de l’ONU pour aller assassiner le Président Kadhafi en est une illustration. C’est soi-disant pour aller au secours du peuple libyen massacré par le dictateur Kadhafi ! Les « liens historiques entre la France et le Bénin » invoqués dans la lettre querellée, sont des liens de violences coloniales pour soumettre nos peuples, leur arracher leur personnalité en leur imposant une langue étrangère, des spiritualités étrangères, une monnaie étrangère, une administration étrangère, etc. Nous répétons : ceci par la force des armes et cela n’a pas changé depuis 1894 jusqu’à aujourd’hui. Ce ne sont pas les liens de démocratie ni d’amitié mais de soumission. L’exemple du Mali est là. Parce que le peuple malien se révèle très patriote, la France n’a rien trouvé de mieux que d’organiser une agression en règle, une occupation militaire de son territoire par djihadistes interposés. Faire appel à la France pour intervenir au Bénin, c’est exactement comme l’a dit un contradicteur des auteurs « La lionne t’attrape pour son repas familial et tu veux te plaindre au lion chef de famille afin qu’il te délivre.» La France a toujours une volonté tenace de revenir occuper physiquement le Bénin, la terre des Béhanzin, Saka Yérima, Bio Guerra, Kaba, Kpoyizoun. Elle est à l’affût pour le faire à la recherche de tout prétexte. L’opération sulfureuse de mai 2019 de «l’enlèvement » de touristes français qui s’est soldé par la mort de notre compatriote guide (Gbédji Fiacre) est là pour illustrer notre propos. D’où le caractère extrêmement dangereux d’appel aux forces étrangères et particulièrement françaises pour des problèmes de démocratie interne au Bénin. La position de principe, excipée de l’expérience des peuples confirmée au plan mondial, c’est qu’un peuple se libère. D’autres ne viennent pas le libérer. A fortiori un Colonisateur ancien et actuel.
Dans la Déclaration du Parti Communiste du Bénin, en date du 7 mai 2019, il est dit :
« Tout problème interne au Bénin, qu’il soit d’ordre politique, sécuritaire ou autre, ne peut être résolu que par le peuple béninois lui-même, certes avec le soutien des peuples du monde, mais sans intervention militaire étrangère ». Les élucubrations pro-coloniales du genre « Vous mangez le riz, le blé, le sucre, le lait, la viande etc. importé et vous êtes panafricains » sont si puériles qu’elles ne méritent que mépris.
N’apparaît-il pas clairement que la démarche des quatre compatriotes est guidée par le « désespoir », une impatience, face à l’apparente puissance du pouvoir de la Rupture et à l’absence apparente de luttes populaires tumultueuses pour y faire face ? Les termes sont précis « Urgence maximale sur le grave recul démocratique au Bénin… C’est un cri d’alarme … ». N’expriment-ils pas « l’impuissance », la non confiance dans notre peuple à faire front à ses défis et à les résoudre ? Et ceci peut-être induit par la position de gens éloignés du champ de bataille du peuple et confrontés à la dure réalité de l’exil ? Il faut le supposer. Or, il n’y a pas de problème insoluble à un peuple. Il sécrète ou secrétera toujours de son sein des acteurs pour se prendre en charge et le conduire à la libération.
Cela dit, la lettre a exprimé des exigences démocratiques incontournables telles que :
«► Réintégrer le système démocratique et l’Etat de droit avant toute initiative électorale ;
► abolir toutes les lois qui menacent nos droits, sources d'insécurité judiciaire et d'injustice pour les citoyens (charte des partis politiques, codes électoral, numérique et pénal, lois sur la révision constitutionnelle et la Cour de Répression des Infractions économiques et du Terrorisme etc) ;
► cesser toutes formes de harcèlements et persécutions à l’encontre des opposants politiques, médias et journalistes indépendants, activistes du web et défenseurs des Droits de l’Homme ;
► faire libérer tous les détenus politiques ;
► créer les conditions favorables à un retour serein au pays, des exilés politiques ;
► abolir toute forme de censure, de surveillance de masse et de restriction de la liberté … ;
► faire la lumière sur les crimes de sang commis avant, pendant et après les élections législatives exclusives du 28 avril 2019 ;
► organiser sans délai, des assises nationales sous formes d'Etats Généraux du Peuple, en vue de tracer un nouveau chemin démocratique pour le Bénin, car notre pays mérite mieux. »
Ces exigences font aujourd’hui « consensus » au sein du peuple béninois et de tous les démocrates de par le monde. Ce sont des exigences de démocratie interne, pour lesquelles le peuple béninois se bat déjà, quotidiennement, bravement, en dépit des grands obstacles qui se dressent sur son chemin (sous la pluie, le vent, le ventre vide et sous menace des arrestations et tortures diverses) bref, en dépit de lourds sacrifices que cela requiert. Notre peuple oeuvre activement au renversement du pouvoir autocratique de Patrice Talon.
Mais notre peuple n’oublie pas que l’Etat qu’est le Bénin est un « Enclos français », que ceux qui nous gouvernent ne sont que des « régisseurs de prison-Bénin », des gouverneurs à peau noire de la France. Et donc que le Vrai Souverain du Bénin, ce n’est pas notre peuple, mais le Président français et Occupant de l’Elysée.
Voilà pourquoi, notre Peuple combat et combattra de toutes ses forces, et l’impérialiste français et ses proconsuls béninois, pour en finir avec le pacte colonial et édifier un Etat souverain, indépendant pour l’instauration d’une Gouvernance patriotique.
Samson GNONHOUE
KPOMASSI SEGLA, TA MEMOIRE VIVRA A JAMAIS !
e 16 septembre 1990, un responsable du Parti Communiste du Dahomey, Ségla KPOMASSI tombait en plein marché d’Azové sous les balles d’un peloton de gendarmerie envoyé par le pouvoir du renouveau démocratique. L’objectif était de stopper la lutte des masses qui ne cessait de s’amplifier et de décapiter le PCD pour le faire disparaitre. Ce crime, comme tous les autres sous le PRBP et le renouveau, demeure impuni jusqu’à ce jour. Nous publions l’Editorial de la Flamme numéro 180 du 03 octobre 1990 paru après cet assassinat horrible.
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« Pour Sègla KPOMASSI en hommage: DES ASSASSINS MIS A NU
On les soupçonnait, on les indiquait selon leurs réactions face à l’assassinat criminel de notre très cher compagnon de combat Sègla KPOMASSI. Mais, on ignorait dans le détail le scénario qui, méthodiquement a conduit les assassins à l’acte criminel. Des révélations commencent par tomber, montrant déjà l’implication des personnes. D’autres révélations tomberont plus tard. Lisez plutôt l’article du journal ‘’ Le Forum de la semaine’’ en date du 26 septembre 1990 et intitulé : « Mort du Conventionnel Sègla KPOMASSI: les causes lointaines du drame ».
« … Les éléments du PCD organisent des marches de protestation qui sont souvent dirigées sur des bureaux de Sous-préfectures ou les domiciles des Sous-préfets. Ils étaient présents le lundi 27 Août 1990 à Aplahoué ». Et sur ces éléments, le journal déroule l’enchaînement des faits et actes des autorités politiques et militaires jusqu’à l’assassinat.
1er Acte: le 27 Août 1990, le Sous-préfet d’Aplahoué, Mr Sébastien Adjahatodé adressa un message radio au Préfet du Mono « Honneur vous rendre compte que suite à opération recouvrement taxe civique menée jeudi 23 Août 90 à Aplahoué avec soutien agents FSP stop. Partisans Convention du Peuple estimés à 150 ont organisé ce jour 27 Août, marche de protestation d’Aplahoué à Azovè clamant interdiction taxe civique. Intéressés venus de Sous-préfecture de Djakotomè, Klouékanmè, Toviklin, Lalo, Aplahoué sont conduits par Sègla KPOMASSI et Sébastien KPATOUKPA, originaires de Djakotomè… ». Et sur ce fait, Mr Adjahatodé d’appeler en renforcement des effectifs de la Brigade d’Aplahoué.
2ème ACTE : Le 06 Septembre 1990, ce fut au tour du Sous-préfet de Klouékanmè, Mr François HOUESSOU d’adresser au Préfet du département, un message radio avec le même contenu et toujours prenant comme cible, Sègla KPOMASSI.
3ème ACTE : Le Préfet du Mono Issa KPARA saisit le 13 Septembre par téléphone, puis par message radio chiffré, Mr Florentin FELIHO : « Toute analyse faite stop, sort Renouveau Démocratique stop tout au moins en ce qui concerne Département du Mono Stop se trouve indiscutablement en jeu stop. MESURES ENERGIQUES DOIVENT ETRE PRISES ET MISES EN OEUVRE car affrontement évité jusqu’à présent S’AVERE IMMINENT (mis en relief par nous). Eu égard à tout ce qui précède stop, appelle votre haute attention sur nécessité et urgence de détacher force de dissuasion ou doter toutes brigades régions susmentionnées d’effectif important de matériel roulant stop. D’ARMES ET MUNITIONS SUFFISANTES… en vue restaurer et affermir autorités et image responsables politico-administratifs pour que force reste à la loi ».
Entre temps, le mercredi 12 Septembre jour du marché d’Azovè, le Sous-préfet d’Aplahoué, le CB Mr Urbain Dacko et les ‘’notables’’ sont allés annoncer la reprise des activités du CEMAMO pour le dimanche 16 Septembre.
4ème ACTE: Le jeudi13 Septembre, Mr le Préfet du Mono a reçu en audience Mr le Sous-préfet d’Aplahoué Adjahatodé ainsi que des ‘’ notables’’ de la Sous-préfecture, en fait un conseil de guerre de la dernière heure puisque dans la même journée, Mr Issa KPARA aura envoyé un 2è message radio au Ministre de l’Intérieur pour lui faire part des dispositifs militaires et des décisions prises à cet effet.
Et l’article de conclure : « Comme prévu par ce message, un peloton d’intervention du département fut envoyé sur le terrain à Aplahoué. Composé de dix éléments, ce peloton était dirigé par le maréchal de logis chef Firmin HOUNYO. TOUT EST FIN PRET. ON ATTEND ALORS LE DIMANCHE 16 SEPTEMBRE 1990, LE JOUR FATAL A SEGLA KPOMASSI » (mis en relief par nous).
Tout apparait ici clair.
1- Mr Issa KPARA, le Préfet du Mono qui prétend n’avoir rien à voir dans la mort de Sègla KPOMASSI est ainsi confondu. Non seulement il est informé, mais encore il est l’un des principaux organisateurs de l’assassinat de connivence avec le Ministre de l’intérieur. Car lorsqu’on déploie des forces militaires avec ARMES ET MUNITIONS, l’objectif est clair.
2- L’on sait très bien que les allégations des autorités telles que Issa KPARA, le CB Urbain Dacko selon lesquelles les Conventionnels s’apprêteraient à utiliser les armes ne sont que couverture du crime pour lui trouver une justification.
3- Nous savons enfin que le 12 Septembre, le Sous-préfet d’Aplahoué Mr Adjahatodé, des responsables locaux du Parti Social Démocrate (PSD), Mr Daniel Lonmadan, (paysan riche) et Jean Amouzoun, (commerçant riche), un représentant du FND, Yéto Mahouna, le CB Urbain Dacko et des gendarmes à la tête d’un commando de délinquants ont sillonné tout le marché d’Azovè pour informer les usagers de la reprise de la collecte des taxes le 16 Septembre. Jean Amouzoun qui jouait le rôle de crieur public a précisément déclaré « le marché du 16 Septembre sera dur, s’il faut abattre des gens, on le fera… ».
Ainsi des fils secrets du crime sont tissés et établis. Le peuple découvrira certainement d’autres; et saura tirer les justes leçons qui s’imposent.
Jean Jacques AZANGOUN
Extrait de ‘’La Flamme N°180 du 03 octobre 1990’’
La guerre silencieuse contre les peuples
Les dix stratégies de manipulation de masses
e linguiste nord-américain Noam Chomsky a élaboré une liste des « Dix Stratégies de Manipulation » à travers les media. Nous la reproduisons ici. Elle détaille l'éventail, depuis la stratégie de la distraction, en passant par la stratégie de la dégradation jusqu'à maintenir le public dans l'ignorance et la médiocrité.
La Rédaction
1/ La stratégie de la distraction
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Élément primordial du contrôle social, la stratégie de la diversion consiste à détourner l’attention du public des problèmes importants et des mutations décidées par les élites politiques et économiques, grâce à un déluge continuel de distractions et d’informations insignifiantes.
La stratégie de la diversion est également indispensable pour empêcher le public de s’intéresser aux connaissances essentielles, dans les domaines de la science, de l’économie, de la psychologie, de la neurobiologie, et de la cybernétique. « Garder l’attention du public distraite, loin des véritables problèmes sociaux, captivée par des sujets sans importance réelle. Garder le public occupé, occupé, occupé, sans aucun temps pour penser; de retour à la ferme avec les autres animaux. » Extrait de « Armes silencieuses pour guerres tranquilles ».
2/ Créer des problèmes, puis offrir des solutions
Cette méthode est aussi appelée « problème-réaction-solution ». On crée d’abord un problème, une « situation » prévue pour susciter une certaine réaction du public, afin que celui-ci soit lui-même demandeur des mesures qu’on souhaite lui faire accepter.
Par exemple: laisser se développer la violence urbaine, ou organiser des attentats sanglants, afin que le public soit demandeur de lois sécuritaires au détriment de la liberté. Ou encore : créer une crise économique pour faire accepter comme un mal nécessaire le recul des droits sociaux et le démantèlement des services publics.
3/ La stratégie de la dégradation
Pour faire accepter une mesure inacceptable, il suffit de l’appliquer progressivement, en « dégradé », sur une durée de 10 ans. C’est de cette façon que des conditions socio-économiques radicalement nouvelles (néolibéralisme) ont été imposées durant les années 1980 à 1990. Chômage massif, précarité, flexibilité, délocalisations, salaires n’assurant plus un revenu décent, autant de changements qui auraient provoqué une révolution s’ils avaient été appliqués brutalement.
4/ La stratégie du différé
Une autre façon de faire accepter une décision impopulaire est de la présenter comme « douloureuse mais nécessaire », en obtenant l’accord du public dans le présent pour une application dans le futur. Il est toujours plus facile d’accepter un sacrifice futur qu’un sacrifice immédiat.
D’abord parce que l’effort n’est pas à fournir tout de suite. Ensuite parce que le public a toujours tendance à espérer naïvement que « tout ira mieux demain » et que le sacrifice demandé pourra être évité. Enfin, cela laisse du temps au public pour s’habituer à l’idée du changement et l’accepter avec résignation lorsque le moment sera venu.
5/ S’adresser au public comme à des enfants en bas-âge
La plupart des publicités destinées au grand-public utilisent un discours, des arguments, des personnages, et un ton particulièrement infantilisants, souvent proche du débilitant, comme si le spectateur était un enfant en bas-âge ou un handicapé mental.
Plus on cherchera à tromper le spectateur, plus on adoptera un ton infantilisant. Pourquoi ? «Si on s’adresse à une personne comme si elle était âgée de 12 ans, alors, en raison de la suggestibilité, elle aura, avec une certaine probabilité, une réponse ou une réaction aussi dénuée de sens critique que celle d’une personne de 12 ans». Extrait de «Armes silencieuses pour guerres tranquilles»
6/ Faire appel à l’émotionnel plutôt qu’à la réflexion
Faire appel à l’émotionnel est une technique classique pour court-circuiter l’analyse rationnelle, et donc le sens critique des individus. De plus, l’utilisation du registre émotionnel permet d’ouvrir la porte d’accès à l’inconscient pour y implanter des idées, des désirs, des peurs, des pulsions, ou des comportements…
7/ Maintenir le public dans l’ignorance et la bêtise
Faire en sorte que le public soit incapable de comprendre les technologies et les méthodes utilisées pour son contrôle et son esclavage. « La qualité de l’éducation donnée aux classes inférieures doit être la plus pauvre, de telle sorte que le fossé de l’ignorance qui isole les classes inférieures des classes supérieures soit et demeure incompréhensible par les classes inférieures. Extrait de « Armes silencieuses pour guerres tranquilles.»
8/ Encourager le public à se complaire dans la médiocrité
Encourager le public à trouver « cool » le fait d’être bête, vulgaire, et inculte...
9/ Remplacer la révolte par la culpabilité
Faire croire à l’individu qu’il est seul responsable de son malheur, à cause de l’insuffisance de son intelligence, de ses capacités, ou de ses efforts. Ainsi, au lieu de se révolter contre le système économique, l’individu s’auto-dévalue et se culpabilise, ce qui engendre un état dépressif dont l’un des effets est l’inhibition de l’action. Et sans action, pas de révolution!…
10/ Connaître les individus mieux qu’ils ne se connaissent eux-mêmes
Au cours des 50 dernières années, les progrès fulgurants de la science ont creusé un fossé croissant entre les connaissances du public et celles détenues et utilisées par les élites dirigeantes. Grâce à la biologie, la neurobiologie et la psychologie appliquée, le « système » est parvenu à une connaissance avancée de l’être humain, à la fois physiquement et psychologiquement.
Le système en est arrivé à mieux connaître l’individu moyen que celui-ci ne se connaît lui-même. Cela signifie que dans la majorité des cas, le système détient un plus grand contrôle et un plus grand pouvoir sur les individus que les individus eux-mêmes.
N'ayez jamais honte de demander conseils, ce sont les gens prudents qui en sont toujours à la recherche.
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Par Luc Garcia
La Guerre des Sahouè (Suite et fin)
Note de la Rédaction :
ar cette livraison, nous terminons le texte de Luc Garcia sur la Guerre des Sahouè. Nous publierons ultérieurement les recherches sur la question telles que développées au séminaire de commémoration du Centenaire en 2018 à Doutou.
La Rédaction.
« Le malaise prenait1des proportions assez sérieuses pour inquiéter les administrateurs de Grand-Popo et du Mono et leur faire réclamer l’envoi d’une soixantaine de gardes « afin de montrer leurs chéchias rouges ». Mais le gouverneur, dans la crainte d’un nouveau conflit, jugea prudent de passer outre, préférant remplacer le chef du poste de Bopa « de caractère exalté », par un autre « administrateur-adjoint plus calme ». Les administrateurs de Grand-Popo et du Mono reçurent en même temps l’ordre de céder sur la question des routes et de l’abattage des palmiers, source de l’effervescence.
Tous les rapports de 1912-13 s’accordent pour reconnaître le manque d’emprise de l’autorité française sur les habitants du cercle qui se refusaient à entretenir les routes et cachaient leurs cases « derrière un épais rideau de brousse qui rend l’accès de leurs villages impraticable à d’autres qu’à eux-mêmes ». En 1914, situation plus calme : seule la perception des taxes continuait de se heurter à une mauvaise volonté générale. En juin 1915, une série d’incidents fait apparaître la précarité de la situation politique du cercle : A Athiémé, Bopa, Parahoué, les notables refusèrent de prêter leur concours à l’administration pour l’enrôlement des tirailleurs, et certains groupes n’hésitèrent pas à prendre les armes pour accueillir les gardes.
En février 1916, les populations sahoué de Doutou, mécontentes du recrutement pour le Cameroun, décidèrent de se rendre à Bopa pour exiger du chef de poste, le renvoi pur et simple des quelques hommes déjà recrutés, quitte à l’obtenir le cas échéant par la force. Elles se mirent en route au nombre de 150 environ, armées de fusils et de coupe-coupe, et parvinrent quelques kilomètres de Bopa, dans le village Ahouélémé. Seule la promesse du chef de canton d’obtenir l’annulation du départ des porteurs leur fit renoncer au projet. Les indigènes désertèrent la plupart des villages et des marchés, et l’administrateur signala de son côté une opposition systématique de tous les cantons à la nouvelle levée d’hommes, particulièrement chez les Houé, les Sahouè, les Dogbo et les Watchi. Désormais, les événements se précipitèrent : incidents sur les marchés, notamment
1Dakar Situation politique août 1918 Cercle du Mono Rapport octobre En 1894 les indigènes du Mono en demandant la protection française contre les incursions dahoméennes prenaient en même temps divers engagements parmi lesquels celui de l’entretien des routes. En outre ce fut au mois de mars 1909 que le gouverneur intérimaire Peuvergne sur un rapport du chef de MOUVEMENTS DE SISTANCE AU DAHOMEY 1914-1917 163 1
2 Le service de Agriculture prit un arrêté interdisant abattage des palmiers régulièrement coupés par les indigènes pour fabriquer du vin de palme Resté au début lettre morte cet arrêté fut intégralement appliqué dès le changement du personnel administratif Or les coutumes des indigènes du Mono prescrivent précisément utilisation du vin de palme dans certaines cérémonies comme par exemple le mariage les funérailles interdiction administrative ne pouvait donc que provoquer chez eux un mécontentement ils estimaient bien justifié et contribuer
à Fonkomè, à l’occasion de la perception des droits de place, opposition aux recrutements, mésintelligence croissante entre les chefs indigènes et l’autorité coloniale, destruction des lignes télégraphiques.
3° Les causes Le mécontentement provoqué par le recrutement n’explique pas seul le réveil de l’esprit insurrectionnel dans le Mono, car, dans le cas présent, un mois séparait la fin du recrutement des premiers symptômes de rébellion. En réalité, le cercle du Mono non plus n’était pas franchement pacifié. Les autochtones, qualifiés alors de « pillards », dénichaient facilement des refuges sûrs dans la forêt et n’acceptaient pas sans réagir les conséquences de l’occupation française. C’est le même état esprit que nous retrouvons dans les autres circonscriptions et qui se profile comme un leitmotiv derrière toutes les rébellions. Cependant, certaines causes, également déterminantes, caractérisaient plus particulièrement le Mono : les indigènes des milieux français et allemands ne manquaient pas de comparer et de juger les procédés employés à leur égard depuis le début des hostilités. En zone française, l’autochtone voyait ses taxes et ses charges sans cesse s’accroître, en même temps il supportait un impôt de sang qu’il considérait comme trop lourd et décevant, tandis qu’au Togo, quelques centaines de mètres plus loin, au-delà d’une ligne purement conventionnelle et incompréhensible pour lui, sujet français, l’indigène allemand jouissait d’une tranquillité enviable. Non seulement la guerre n’augmentait pas ses obligations, mais surtout, elle supprimait celles qu’il subissait sous la domination allemande : au Togo révélait un rapport de Fourn, « les taxes directes ne sont pas perçues parce que l’Administration anglaise voisine s’y oppose ». La situation était naturellement examinée, discutée dans les milieux indigènes et, bien entendu, exploitée par les anciens agents allemands dans leur propagande antifrançaise ; cela semble contredire, en ce qui concerne le Mono tout au moins, l’opinion de R. Cornevin qui rejette toute influence de la propagande allemande dans les divers mouvements de rébellion du Dahomey2. Tous les discours patriotiques s’effondrèrent alors comme un château de cartes devant les constatations des autochtones : « Oui, disaient-ils, certes les Allemands sont absents mais leur puissance est telle et rayonne si fort au-delà des mers que ceux qui ont pris leurs biens n’osent pas y toucher ». Des bandes armées incitaient la population à prendre parti : « Si vous êtes pour les Allemands couvrez votre toit de feuilles de palmiers et vous devenez nos amis ; si vous êtes pour les Français nous vous ferons la guerre ». Enfin la rébellion commença un 14 juillet, jour de la fête nationale française : étrange coïncidence !
du même coup étendre le malaise primitivement localisé dans certaines régions Après sa tournée dans le cercle le chef intérimaire de la colonie Antonetti constatait son tour que si les indigènes abattaient beau coup de palmiers en effet ils en plantaient également beaucoup afin de pouvoir en abattre car ils semblaient se rendre un compte trop exact de la valeur de leurs palmeraies pour les détruire inconsidérément Dakar Complé ment au rapport politique du 2e trimestre 1909 Situation du Mono.
Rapport du chef de subdivision de Bopa
P
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A ces causes principales, venaient s’ajouter l’animosité des Adja contre les « groupements voisins disciplinés », leur désir de vengeance à l’égard de certains chefs dévoués à la cause française, sans oublier les troubles consécutifs aux opérations de recrutement. Ainsi à Lokossa par exemple, les chefs des cantons sahoué « auraient envoyé des récadères piller les cases des gens absents et violer des femmes ». Quant au chef de Bopa « il aurait recruté un contingent de 36 hommes en satisfaisant des vengeances de famille. Ses récadères auraient même violé un couvent de femmes de féticheurs et mutilé un homme ». La situation politique de la colonie apparaissait si complexe que Clozel avouait lui-même en passant les services du Gouverneur général à son successeur Angoulvant en 1916, qu’il ne voyait pas clair dans l’imbroglio dahoméen. A la lumière de toutes les révoltes qui contredisaient l’optimisme de l’administration locale, il existait divers points sporadiques de résistance dans chaque cercle. Dans son souci de rétablir l’ordre, d’asseoir l’autorité d’une administration, jamais reconnue par les indigènes, Angoulvant, établit alors un plan méthodique et complet de prise en mains du pays. Le programme des opérations, réglé jusque dans le détail, après accord avec le général commandant supérieur, ne fut que partiellement exécuté pour des motifs qui nous échappent. Tout laisse penser cependant que l’une des raisons fondamentales résidait probablement dans l’histoire même du Gouvernement général entre 1915 et 1920, ses changements continuels de chefs, les flottements qui en découlaient dans la direction générale de la politique indigène en A.O.F., le retour à un certain esprit de temporisation…. Aux préoccupations que lui donnaient ces îlots de rébellion ouverte ou de résistance passive qui sévissaient un peu partout et non pas localisés exclusivement « chez les populations les plus frustres » comme le mentionne R.Cornevin dans son Histoire du Dahomey, s’ajoutait un autre souci : celui de la situation morale fort médiocre de la région de Porto-Novo. Les Porto-Noviens, gagnés par certaines idées de libéralisme, se considéraient à leur tour comme des persécutés et étaient prêts à toutes les révolutions anticolonialistes, anti-françaises. Ils n’acceptaient nullement l’obligation au service militaire :
« Les actes insubordination de toute natures, les désertions des tirailleurs ou les fuites insoumis ne comptent plus ... Alors il faut y pratiquer une bonne politique indigène écrivait Angoulvant en août 1918 au ministre des Colonies, celle qui ne tolère ni abus, ni faiblesse, et encore moins les agissements délictueux et criminels chez les administrateurs ... Je suis fermement décidé à rompre avec la politique de temporisation qui déjà fait tant de mal à cette colonie. De quelque nom qu’on la décore, qu’elle cherche sa justification dans les théo ries de prudence, de bonté ou d’apprivoisement, cette politique est une des formes de la paresse d’esprit et du manque de courage qui refuse de voir le danger pour ne pas avoir la peine de le conjurer. »
Et de conclure :
« Ce qu’il faut au Dahomey, c’est regarder virilement la situation en face, mesurer à l’étendue des difficultés l’importance des moyens mettre en oeuvre pour les résoudre, et le programme de mise en mains une fois établi, en poursuivre l’exécution humainement, mais méthodiquement et avec une résolution implacable. Je n’y faillirai pas. »
La situation politique, économique et sociale du Dahomey d’aujourd’hui redonne à ces écrits vieux de cinquante ans, un sens nouveau et en fait une leçon pour nos dirigeants du moment, car les révolutions de palais sont fréquentes. ..Pauvre Dahomey !
Luc Garcia « Les mouvements de résistance au Dahomey (1914-1917 » in Cahiers d’Etudes africaines n° 37 1970, pp. 163-166)
Arrondissement de TAN dans la Commune de Zagnanado
Le nouveau CA face à la question de la bonne gestion de la carrière de granite.
près les élections municipales controversées de mai 2020, l’administration décentralisée a connu de nouvelles équipes exécutives locales partout dans le pays. L’Arrondissement de TAN dans la Commune de Zagnanado n’a pas fait exception.
En effet, le Chef d’Arrondissement (CA) sortant Jean TOBOULA, misant sur le pouvoir qu’il détenait et surtout sur sa générosité conjoncturelle pensait revenir à la tête de l’exécutif local. Or, non seulement au plan général, les règles et les données de désignation des chefs locaux ont été profondément modifiées par le pouvoir central, mais même au niveau de l’arrondissement de TAN, Monsieur TOBOULA, CA fantôme n’est plus chouchouté. Et pour cause ! L’arrondissement de TAN, dans la commune de Zagnanado abrite une carrière de granit dont l’exploitation donne lieu à la perception de taxes. Ces taxes perçues constituent une source de revenu substantiel aussi bien pour la Commune que pour l’Arrondissement.
Mais la gestion des sous par le maire Symphorien MISSEGBETCHE et son CA Jean TOBOULA reste opaque pour la population. C’est pourquoi, cette dernière, surtout dans sa couche juvénile bien que n’ayant pas joué un rôle essentiel, se réjouit de la désignation du jeune Lucien AIZAN comme nouveau CA de TAN. Elle se réjouit simplement déjà à partir du moment où le nouveau CA promet à la population de bien gérer les ressources de l’Arrondissement.
C’est la preuve donc que tous ceux-là se sentent concernés par la gestion des biens de la communauté. Mais pour que ce souci de l’implication de tous dans la gestion de la cité soit une réalité, il faut plus que des promesses des dirigeants, surtout si ces derniers ne sont pas l’émanation des administrés.
Alors, en prenant acte des déclarations de bonnes intentions du nouveau CA, la jeunesse et la population de TAN en général doivent se donner les moyens et les formes d’organisation nécessaires pour amener le CA à une gestion dans l’intérêt général.
C’est cela qui peut être le gage d’un contrôle populaire, instrument infaillible de bonne gestion et de bonne gouvernance.
Dossou
Correspondant du Zou
A
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COVID-19 : Gros bénéfices aux grandes entreprises,
misère et souffrance accrues aux pauvres
elon un rapport de OXFAM publié le 10 septembre 2020, il est
mentionné en introduction que : « Trente-deux des plus
grandes entreprises du monde devraient voir leurs bénéfices
augmenter de 109 milliards de dollars de plus en 2020 alors que la
pandémie du COVID-19 dévoile un modèle économique qui génère
des bénéfices pour les plus riches sur le dos des plus pauvres ». En
effet, le même rapport précise que :
• «Dix des plus grandes marques de vêtements au monde ont
versé 74% de leurs bénéfices (un total de 21 milliards de
dollars) à leurs actionnaires sous forme de dividendes et de
rachats d'actions en 2019. Cette année, 2,2 millions de
travailleurs au Bangladesh seulement ont été touchés par
l'annulation des commandes de textiles. Les fermetures
d'usines ont réduit les revenus du pays d'environ 3 milliards de
dollars.
• En Inde, des centaines de travailleurs des plantations de thé,
dont beaucoup sont des femmes, n'ont pas été rémunérés à la
suite du verrouillage de Covid-19. Dans le même temps,
certaines des plus grandes sociétés de thé indiennes ont
augmenté leurs bénéfices ou ont pu maintenir leurs marges
bénéficiaires en réduisant les coûts.
• Les opérations minières au Pérou sont restées ouvertes malgré
les risques élevés d'infection parmi leurs employés.
• Chevron a annoncé des réductions de 10 à 15% de ses 45.000
employés dans le monde malgré des dépenses plus
importantes en dividendes et en rachats d'actions au cours du
premier trimestre de l'année que celles générées par son
activité principale.
• La plus grande société de ciment du Nigéria, Dangote Cement,
aurait licencié plus de 3000 employés sans préavis ni procédure
régulière, tandis que la société devrait toujours verser 136% de
ses bénéfices aux actionnaires en 2020. »
En conclusion, Oxfam précise qu’à l'échelle mondiale, un demimilliard
de personnes devraient être poussées dans la pauvreté par
les retombées économiques de la pandémie. 400 millions d'emplois
ont déjà été perdus et l'Organisation internationale du travail estime
que plus de 430 millions de petites entreprises sont en danger.
Pendant ce temps, la protection accordée aux actionnaires a
alimenté une flambée du cours des actions. Les 100 premiers
gagnants du marché boursier ont ajouté plus de 3 milliards de dollars
à leur valeur marchande depuis la pandémie. En conséquence, les 25
milliardaires les plus riches ont augmenté leur richesse de montants
stupéfiants. Jeff Bezos (le patron de Amazon, la firme américaine de
vente en ligne) pourrait personnellement verser à chacun des
876.000 employés d'Amazon une prime unique de 105.000 $
aujourd'hui et être toujours aussi riche qu'il l'était au début de la
pandémie. Evidemment, il ne le fera pas. Cela montre les gros
bénéfices tirés.
Oxfam constate donc ainsi que la capacité de nombreuses
entreprises à faire face aux dommages économiques causés par la
pandémie et à prendre soin de leurs employés a été gravement
compromise par des années d’augmentation des paiements aux
actionnaires ; certaines entreprises ayant remis des montants
nettement supérieurs à leurs bénéfices.
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